Depuis ma tendre enfance, la lutte fait partie de mon ADN. J’ai grandi devant les soirées endiablées du Monday Night Raw à l’époque de l’Attitude Era, une période où la WWF, devenue depuis la WWE, poussait les limites du divertissement sportif. Les noms de Stone Cold Steve Austin, The Rock, The Undertaker ou encore la légendaire D-Generation X résonnent encore dans ma mémoire comme des hymnes de rébellion et de charisme. Ces héros du ring incarnaient plus qu’un simple spectacle : ils représentaient la liberté, la colère et l’expression de soi à travers la performance physique.
Avec les années, la flamme s’est atténuée. Les priorités changent, les émissions se transforment, et l’univers de la lutte paraît parfois plus distant. Mais voilà qu’un vent nouveau souffle sur le Québec : une scène locale dynamisée, vivante, pleine de talents qui réinventent la lutte avec cœur. Ce renouveau a rallumé quelque chose en moi. Alors, quand j’ai aperçu le titre DGenerate : La lutte expliquée aux enfants sur la couverture d’un livre jeunesse, mon instinct de fan s’est aussitôt réveillé. Un clin d’œil évident à mes idoles d’antan, mais sous une forme inattendue : celle d’un album illustré pour enfants.
Un ring dans la cour d’école
Écrit par Nathalie Dupont et illustré par Pishier, DGenerate : La lutte expliquée aux enfants plonge dans un univers où la lutte devient une métaphore de l’enfance. L’histoire met en scène un jeune garçon qui découvre la lutte comme exutoire, comme un moyen de s’affirmer dans un monde parfois dur à comprendre. Ce qui frappe d’entrée de jeu, c’est à quel point on réussit ici à transposer la dramaturgie du ring dans le quotidien d’un enfant : les rivalités prennent la forme de chicanes de cour d’école, les entrées spectaculaires deviennent des moments de courage, et les prises de lutte symbolisent les émotions que l’on apprend à maîtriser.
Le livre parvient à rendre tangible l’énergie et la passion du spectacle tout en parlant de gestion des émotions, de reconnaissance et de persévérance. Les mots de Dupont vibrent avec une tendresse qui n’enlève rien à la fougue du sujet. Pishier, quant à lui, donne vie à cette histoire avec des illustrations vives et expressives, où chaque coup de pinceau semble animé par la puissance d’un body slam.
Ce qui rend l’ouvrage si unique, c’est la façon dont il fait le pont entre deux mondes : celui des adultes qui ont grandi avec la lutte comme moi, et celui des enfants qui y découvrent un nouvel imaginaire. Loin d’être une simple référence nostalgique, le livre offre une lecture multigénérationnelle.
Une célébration de la passion, du courage et de l’identité.
La lutte comme métaphore du rêve et du dépassement
Sous sa surface ludique, l’album jeunesse aborde des thèmes universels : le rêve, la confiance en soi et le besoin de s’exprimer. Comme les lutteurs qui se forgent des personnages pour exister sur scène, l’enfant du récit apprend à trouver sa voix, à s’assumer pleinement. Il comprend que la force n’est pas que physique, elle est aussi émotionnelle.
Le livre réussit à transformer les enjeux de la lutte en symboles de croissance : les adversaires deviennent des peurs intérieures, le public représente le regard des autres, et le ring devient un espace de confrontation personnelle. C’est une idée puissante, parce qu’elle montre que, même dans le tumulte des émotions enfantines, il est possible de canaliser sa colère et son énergie pour en faire quelque chose de beau.
La lecture évoque aussi cette frustration douce de l’enfant qui rêve d’être plus grand, d’atteindre les projecteurs, tout en apprenant à composer avec ses limites. Dupont parvient à parler de lutte sans jamais glorifier la violence : elle met plutôt en avant le respect, la camaraderie et la passion. Ce faisant, DGenerate : La lutte expliquée aux enfants devient une ode à la persévérance, une leçon de vie déguisée en match de championnat.
Un hommage à la scène québécoise et à Philippe Munger
Le livre puise son inspiration dans la carrière du lutteur québécois Philippe Munger alias DGenerate, figure bien connue du circuit indépendant, notamment à la AWE. Munger, avec son charisme et sa présence scénique, incarne cette nouvelle génération de lutteurs d’ici qui font briller la passion locale. Son parcours n’est pas sans rappeler celui du jeune héros du livre : un individu qui, par le biais de la lutte, trouve un sens à ses efforts puis forge une communauté et une identité.
En s’inspirant de Munger, Dupont et Pishier ancrent leur récit dans une réalité québécoise vibrante, loin des paillettes américaines, mais tout aussi sincère. On y retrouve cette énergie brute et cette authenticité qui caractérisent la scène québécoise actuelle. Et c’est précisément cette dimension qui fait de DGenerate : La lutte expliquée aux enfants un ouvrage marquant : il ne cherche pas seulement à divertir, mais à reconnecter le lecteur à la passion qui sommeille en lui, qu’il soit un enfant découvrant la lutte ou un adulte qui l’a jadis aimée.
Coup d’atémie droit au cœur
C’est une œuvre qui célèbre le courage, la passion et la transmission des valeurs au cœur même de la lutte, mais aussi de l’enfance. Nathalie Dupont et Pishier offrent ici un livre rare, capable de parler aussi bien aux jeunes qu’à ceux qui ont grandi au rythme des “If you smell… what The Rock… is cooking!”.
Pour en savoir plus sur l’album jeunesse DGenerate : La lutte expliquée aux enfants , c’est par ici!
