La 9e édition du festival Zoofest a eu lieu du 6 au 29 juillet derniers. Fondé en 2009, le Zoofest met de l’avant une programmation dédiée à la prise de risque et à la découverte de talents émergents dans les milieux de l’humour, de la musique, du théâtre et du divertissement. L’an dernier, le volet anglophone OFF-JFL a rejoint le festival, ce qui a considérablement élargi la programmation.
Je vais au Zoofest à chaque été depuis 4 ou 5 ans déjà et j’aime beaucoup ce festival qui est plus underground, moins dispendieux et surtout moins politically correct que Juste pour rire.
Je dois toutefois avouer, bien malgré moi, que cette 9e édition m’a laissé sur mon appétit. Rien (ou presque) ne m’a jeté par terre, contrairement aux années précédentes. Les spectateurs ont pourtant répondu à l’appel en grand nombre tout au long du festival, plusieurs spectacles affichant complet et l’organisation annonçant une affluence record de 125 000 festivaliers. En contrepartie, les détenteurs d’une Zoopass ont semblé avoir beaucoup de difficulté à réserver leur place pour de nombreux spectacles. Comme quoi le bonheur des uns fait le malheur des autres.
Voici donc un résumé des spectacles auxquels j’ai eu la chance d’assister cette année.
Échapper le gâteau – David Beaucage (samedi 8 juillet)
Moins connu du grand public que certains autres humoristes avec qui il a gradué de l’École Nationale de l’Humour (Katherine Levac, Jay Du Temple, Mehdi Bousaidan), David Beaucage est un drôle de numéro. Sa bouille sympathique et ses mimiques nous rappellent le Jim Carrey des beaux jours. Il est à son meilleur lorsqu’il nous fait des imitations ou qu’il nous chante des chansons farfelues.
Le reste du contenu est toutefois plutôt inégal. Certains gags tombent à plat et il s’enfarge quelquefois dans ses mots. Son charisme et son talent restent indéniables. Mention spéciale à son entrée sur scène alors qu’il fait semblant d’être malade et qu’il demande à sa première partie, Pierre-Yves Roy-Desmarais (efficace d’ailleurs pour réchauffer la foule), de nettoyer le tout.
En somme, un spectacle sympathique pour un public conquis d’avance. De très bons flashs, mais un manque d’exécution à certains moments. Il n’est pas facile d’avoir 60 minutes de bon matériel. Le talent est là, mais la période de rodage se poursuit pour David !
Note : 3/5
Presque Adulte – Arnaud Soly (dimanche 9 juillet)
Surtout connu pour ses vidéos où il joue de la flûte à bec avec le nez (allez jeter un coup d’œil, c’est impressionnant et troublant à la fois), Arnaud Soly est avant tout un gars d’improvisation. Il s’est mis au stand-up assez récemment et participera notamment à la prochaine saison de l’émission Les 5 prochains sur ARTV.
Il présentait son premier 60 minutes dans le cadre du Zoofest, abordant le thème universel de la vie adulte. Tout comme David Beaucage, la qualité du matériel présenté était inégale. Nous avions de plus déjà entendu une partie de celui-ci dans d’autres soirées d’humour, ce qui a grandement réduit l’effet de surprise.
La transition d’improvisateur à humoriste ne se fait pas les doigts dans le nez (scusez-la) et il faut lui laisser du temps. Le potentiel est là, mais il devra travailler certains aspects, notamment son rythme. Arnaud Soly bénéficie déjà d’une bonne base d’admirateurs et je suivrai définitivement du coin de l’œil sa progression au cours de la prochaine année.
Note : 3/5
Mais… – Jay Du Temple (lundi 10 juillet)
Certainement l’un des humoristes de la nouvelle génération les plus charismatiques, Jay Du Temple charme les foules partout où il passe. Le futur animateur d’Occupation Double n’en était pas à son premier 60 minutes au Zoofest, et il était de retour pour tester une nouvelle heure de matériel devant une salle pleine à craquer.
Saluons premièrement le choix de performer à La Balustrade du Monument-National, une petite salle plus intimiste qui sied à merveille à son style. En effet, Jay est très proche de son public, avec qui il interagit fréquemment durant le spectacle. Aucun doute, il est très à l’aise sur scène.
Le contenu qu’il nous propose tourne lui aussi autour de la vie adulte et du temps qui file à vive allure. Il nous raconte des anecdotes sur ses virées au spa, sur sa relation avec son ex-copine ou encore sur la fois où il a subi un examen des testicules.
Charmant et attachant, il nous fait sourire, mais rarement rire aux éclats (le bout improvisé sur Occupation Double est l’un de ses meilleurs moments). C’est ce qui arrive lorsque l’on rode du matériel : on présente du nouveau contenu, mais tout n’est pas encore à point.
Peu importe, nul doute que Jay Du Temple occupera une place importante dans le milieu de l’humour québécois pour les années à venir. Son premier one-man show se pointe à l’horizon et mon petit doigt me dit que les billets partiront comme des petits pains chauds.
Note : 3/5
LOVE – Rosalie Vaillancourt & Pierre-Yves Roy-Desmarais (mardi 11 juillet)
Formant un vrai couple dans la vie de tous les jours, Rosalie Vaillancourt et Pierre-Yves Roy-Desmarais (son nom fait concurrence à celui de Philippe Audrey Larrue-St-Jacques en termes de longueur) tenaient à nous offrir quelques conseils pour que nos couples soient aussi solides que le leur.
Rosalie est l’une des « nouvelles humoristes » les plus en vogue et définitivement l’une de mes préférées. Pierre-Yves, un peu dans l’ombre de sa douce et venant tout juste de terminer l’École Nationale de l’Humour, a été l’une des belles révélations de ce Zoofest 2017. J’étais donc très curieux de voir ce qu’ils nous offriraient avec ce « LOVE ».
Leur vidéo d’introduction à thématique « film d’ados », mauvais doublage « français de France » en prime, était tout simplement délicieux. Ça commençait fort. Premier constat : les deux forment un beau duo sur scène et se complètent très bien. Mélange de vidéos, de sketchs et de stand-up, le concept de leur spectacle est sympathique, mais il lui manque un je-ne-sais-quoi.
Bref, des moments très bons et d’autres moins intéressants. On salue tout de même leur belle complicité et leur talent indéniable. Si la tendance se maintient, ils seront assurément un des « power couple » de l’humour au cours des prochaines années. On leur souhaite!
Note : 3,5/5
Extremiss (mercredi 12 juillet)
Aucun pays n’est à l’abri de tragédies comme celles qui ont secoué Paris, Londres ou, plus récemment, Barcelone. Face à un sentiment de terreur de plus en plus présent, certains humoristes d’ici ont voulu utiliser l’humour comme arme pour combattre le terrorisme et la radicalisation. Après tout, le contraire de la peur, c’est le rire.
Animé de belle façon par Anas Hassouna, ce spectacle était présenté devant une salle bondée. L’atmosphère était électrisante et on sentait que la foule était prête à faire un pied de nez à l’extrémisme en riant à gorge déployée.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que les spectateurs en ont eu pour leur argent. Pas moins de 9 humoristes se sont succédé sur scène pendant les 105 minutes qu’aura duré le spectacle. Tous les numéros n’auront pas été aussi solides, mais soulignons les performances de Mehdi Bousaidan (très bon en lever de rideau), d’Adib Alkhalidey (qui nous a offert une finale survoltée !), d’Eddy King et de Louis T (tous deux très pertinents). La cerise sur le sundae? Une performance surprise de Rachid Badouri qui est venu roder un numéro pour un gala Juste pour rire.
Sans surprise, une supplémentaire a été ajoutée par la suite compte tenu du succès du spectacle.
Note : 4/5
Julien Lacroix et Mehdi Bousaidan (jeudi 13 juillet)
Deux des humoristes les plus en vue actuellement, Julien et Mehdi ont annoncé dernièrement qu’ils partaient en tournée un peu partout au Québec, et ce, jusqu’au printemps 2018. Ils débutaient leur périple avec quelques dates au Zoofest. Puisque les deux font partie de mes humoristes préférés, j’étais bien entendu au rendez-vous pour leur première.
La salle était bondée et l’ambiance survoltée. Tout était en place pour une belle soirée. Je dois dire que j’ai été toutefois un peu déçu. Honnêtement, on avait parfois l’impression que Mehdi et Julien étaient plus ou moins préparés. Les numéros en duo étaient plutôt décousus et manquaient de punch. Dommage, considérant leur talent respectif.
Les numéros individuels étaient beaucoup plus solides, même si j’avais déjà entendu la majorité du matériel par le passé. Encore une fois, l’effet de surprise en prend pour son rhume dans une telle situation.
Tous deux charismatiques et très différents dans leur style, ils sont objectivement très drôles. On espère simplement du nouveau matériel prochainement pour pouvoir apprécier pleinement leur immense potentiel comique.
Note : 3/5
La Table d’hôte (mercredi 19 juillet)
Nouveau concept de spectacle qui reviendra lors des prochaines années, cette table d’hôte nous promettait un menu alléchant pour sa première mouture : Rosalie Vaillancourt, Julien Lacroix, Guillaume Pineault et Sam Breton. À tour de rôle, les 4 humoristes présentaient un numéro solo, le tout entrecoupé de numéros de groupe inspirés d’émissions de télévision connues (Les Dragons, Un souper presque parfait, En route vers mon premier Gala Juste pour rire, etc.).
Rosalie Vaillancourt brise la glace de brillante façon et s’avère la plus mordante et la plus efficace du groupe. Guillaume Pineault nous raconte ensuite son voyage de couple à Disney. Ses talents de conteur sont indéniables, mais son récit nous fait sourire plus que rire. Julien Lacroix, de son côté, est déjanté comme à son habitude et débite son texte à un rythme effréné. Très drôle, mais on venait d’entendre son matériel la veille lors de son spectacle avec Mehdi (les risques d’assister à plusieurs spectacles au Zoofest). Sam Breton conclut le bal avec une solide performance. Une belle révélation.
Quant aux numéros de groupe, ils touchent la cible et chacun se permet de lancer quelques pointes à ses collègues. On croirait assister à un « roast » et on aime. Cette table d’hôte s’avère donc savoureuse, mais ce n’est pas le festin royal espéré non plus. Qui fera partie de la mouture 2018? Personnellement, je mettrais un petit deux sur Arnaud Soly et Maude Landry. On s’en reparle l’an prochain!
Note : 3,5/5
Mouhahaha ! – Jérémie Larouche (mercredi 19 juillet)
Un des humoristes les plus sous-estimés de sa génération, Jérémie Larouche nous avait charmés l’an dernier avec son spectacle « La saga des étoiles » qui parodiait en 60 minutes les 6 premiers films de Star Wars (il avait d’ailleurs remporté le prix « Coup de cœur » du Zoofest pour ce spectacle).
Il récidivait cette année avec une nouvelle heure de blagues, cette fois-ci au Théâtre Sainte-Catherine. En première partie, un humoriste de la Colombie-Britannique (mea culpa, on a oublié son nom !) nous a bien fait rire en abordant son homosexualité. Sympathique, même s’il ne réinvente rien.
Jérémie monte ensuite sur scène. Farceur naturel, il nous raconte les mauvais coups qu’il fait au quotidien et une foule d’anecdotes savoureuses. Aucun doute, il est très à l’aise sur scène et possède une imagination débordante. Malgré une petite baisse de régime vers la moitié du spectacle, il termine en force avec une histoire hilarante dans laquelle il raconte son voyage de noces qui implique l’utilisation de certains jouets pour adultes. Bref, une belle soirée en bonne compagnie. Ce Jérémie Larouche n’a pas fini de nous surprendre. Il mérite qu’on lui accorde plus d’attention!
Note : 3,5/5
60 humoristes en 60 minutes (vendredi 21 juillet)
Concept mis au monde par le talentueux Gabriel D’Almeida Freitas, ce spectacle est devenu une tradition du Zoofest depuis quelques années. Pour un soir seulement, 60 humoristes montent sur scène à tour de rôle et ont une minute chacun pour nous faire rire (pas une seconde de plus, sans quoi leur micro est coupé).
N’ayant encore jamais eu la chance d’y assister, j’avais bien hâte d’y être et mes attentes étaient quand même grandes. Or, je suis sorti de la salle terriblement déçu…
Je ne comptais plus le nombre d’humoristes qui sont montés sur scène et qui ont littéralement gaspillé la minute qui leur était accordée. 60 secondes aux vidanges, vlan! Un qui se fait « interrompre » par ses amis qui jouent au ballon autour de lui, un autre qui cale de la bière, plusieurs qui débutent leur blague… puis deviennent muets… avant de terminer leur gag à la dernière seconde, et j’en passe.
Bref, une perte de temps pour eux et pour nous surtout. C’est à se demander s’ils n’ont pas su qu’ils participaient au spectacle cinq minutes avant le début (ce qui est possible, puisqu’on a entendu entre les branches que certains humoristes s’étaient décommandés à la dernière minute).
Heureusement, certains se sont forcés et ont livré de bonnes performances. Le hic : on ne connaît pas leur identité pour la plupart, puisque le nom des artistes n’a jamais été mentionné au cours de la soirée.
On s’attendait donc à beaucoup plus de ce « 60 humoristes en 60 minutes ». Espérons que l’édition 2018 soit plus à la hauteur du concept.
Note : 2/5
Not Gala (samedi 22 juillet)
Animé par Jay Du Temple, ce Not Gala réunissait plusieurs humoristes qui avaient fait l’impasse (par choix ou non) sur les galas d’humour plus traditionnels (lire ici les galas Juste pour rire). À l’aise comme un poisson dans l’eau, Jay a été fort efficace à l’animation.
Tout comme pour le spectacle Extremiss, les spectateurs en ont eu pour leur argent, le spectacle durant plus de 90 minutes et mettant en vedette plus d’une douzaine d’humoristes. Il y a eu plusieurs moments forts et d’autres beaucoup moins mémorables.
Parmi les bons coups, mentionnons Christine Morency (belle découverte!), Thomas Wiesel (sarcastique à souhait), Simon Delisle (solide comme toujours), Mike Beaudoin (surprenant), Roman Frayssinet (fascinant comme à l’habitude) et Guillaume Pineault (tordant avec ses anecdotes de moto).
À l’opposé du spectre, je suis resté plutôt indifférent face aux performances de Julien Lacroix (du déjà-vu), de Charles Pellerin, de Fary, de Mathieu Pepper, de Kevin Raphaël et de Julien Corriveau (cinq numéros plutôt beiges).
En terminant, où était donc Kyan Khojandi? Celui que l’on connaît comme le gars de « Bref. » était annoncé au programme, mais n’est jamais monté sur scène. Empêchement de dernière minute? Chose certaine, on a été déçus de ne pas le voir en action.
Bref, ce Not Gala n’avait définitivement rien à envier aux grands galas traditionnels. On a particulièrement aimé l’absence de flafla et la liberté offerte aux humoristes.
Note : 3,5/5
Mention de source pour les photos : Zoofest