Dans cet article, le féminin est utilisé sans discrimination des genres, pour alléger le texte.
Le Théâtre d’Aujourd’hui, haut lieu de la création et la diffusion théâtrale québécoise, révélait sa saison 2015-2016 la semaine dernière. Je vais t’éviter un copier-coller de la ligne de presse et t’offrir mon analyse personnelle. Ça va se faire au coût de quelques pièces que je ne nommerai pas (plus de la moitié) pour me concentrer sur ce qui m’a frappé. En gros, je te fais mon top 3 dans le désordre.
D’abord, il y a Starshit : une immersion dans la culture des Starbucks et autres franchises cafetières (donc, pas le film de Patrick Huard). « Notre mandat : aider les gens à affronter leur journée en toute sérénité / Notre devise : Un café pour partir du bon pied / Notre motivation : Le goût d’un monde meilleur / Moi, ça me parle ». Étant un adepte (accro ?) des petits cafés non-franchisés de quartier, le sujet m’interpelle et m’intrigue. La proposition de Jonathan Caron et Julie Renault (texte) est intéressante. D’une part, utiliser l’icône de la franchise de café ouvre la porte à une critique sociale visant autant les consommatrices que les employées, tous maillions d’une même chaîne de travailleuses blasées. D’autre part, le scénario propose d’inverser le cliché de l’employée de café, celle désabusée de la vie, déconnectée de son produit, qui aligne les heures de travail pour acheter de la bouffe à son chat plutôt que pour l’amour du café. Dans cette pièce, on propose de lui donner un peu trop goût à son produit. Comme si elle était membre d’une secte convaincue de l’utilité du p’tit café matinal à 2,75 $. Pourtant, s’il y avait une part de vérité là-dedans ? Que finalement, l’employée de Starbucks soit véritablement un élément clef dans ta vie ? Un peu comme l’employée du McDo quand tu rentres chez vous vers 3h du matin. Elle sacrifie sa nuit pour ton p’tit bonheur, comme l’employée du Starbucks sacrifie ses matins pour que tu sois active à ton cours de 8h30. J’ai bien hâte de voir cette pièce en avril 2016 question de savoir quel angle l’équipe du Théâtre d’Aujourd’hui va lui donner.
Ensuite, mon attention a été attirée par Unité Modèle de Guillaume Corbeil (texte). En gros, on te parle du « bonheur clé en main » que tu t’achètes dans un condo de rêve, dans un quartier de rêve. On te parle du rêve américain à saveur moderne. De ta trentaine fortunée, pis de liberté 55. Comme Corbeil l’a dit lui-même, ce décor de p’tite vie parfaite calculée au millimètre près ressemble à une pièce de théâtre, où il ne manquerait que nous comme personnages. La pièce se veut un regard nouveau sur l’embourgeoisement à coup (à coût ?) de surendettement de la classe moyenne. Bref, un sujet déjà exploré, mais qui garde un bon potentiel. Ceci dit, le défi est énorme pour la pièce. Comment critiquer le rêve américain sans tomber dans le cliché et le déjà vu. Pour l’instant, l’équipe est prometteuse. Un rendez-vous pour avril 2016.
Puis, il y a Après. L’histoire d’un ingénieur accusé du meurtre de ses deux jeunes enfants. Vous avez dit Dr Turcotte ? La pièce met en scène la rencontre entre cet ingénieur hospitalisé et son infirmière, seule interlocutrice des réflexions qui peuplent son isolement. Toutes les conditions sont réunies pour une pièce coup de poing qui te joue dans le côté sombre de la nature humaine. Ce qui est d’autant plus intéressant, c’est que toutes les spectatrices arrivent déjà avec un lot de préjugés, souvent viscéraux, provenant de l’hypermédiatisation du cas du Dr Turcotte. La pièce sera donc d’autant plus poignante puisqu’elle nous prend avec notre lot de préconceptions pour nous faire voyager, évoluer. Il y a de quoi t’ébranler le sens de la justice en février 2016.
Au-delà de ces trois pièces qui ont attiré mon attention, j’offre une mention spéciale pour Après la peur et Papiers mâchés. Après la peur, c’est des sorties en minibus où chaque véhicule a son univers et ses histoires. Une mise en scène décomplexée donc. On t’amène en aventure en septembre 2015. Papiers mâchés, c’est le stand-up poétique de David Paquet en novembre 2015. Comme j’aime la poésie, j’ai cru important de t’en glisser un mot.
Bon, allez ! On se revoit au théâtre. Tu me dis quel jour tu y vas et on s’arrange une date.