Lettre à ma fille en crise

Ce matin, j’ai le cœur brisé. Pas de peine d’amour, pas de drame apparent dans ma vie. Non, juste le cœur brisé parce que je réalise que notre relation vient d’entrer dans une nouvelle étape.

Hier soir, tu as fait une méga crise. Une gigantesque crise, le genre de crise qui change tout. Comme toutes les crises, la cause de celle-ci m’échappe complètement. J’ai pas mis ton ketchup à la bonne place dans ton assiette. Oui, je sais, j’aurais dû deviner que tu ne le voulais pas dans ce coin-là, mais plutôt à côté de tes frites. Mais il était trop tard, le geste était déjà posé et comme une première bombe lancée dans un conflit armé, la guerre était déclarée.

Tu es devenue une personne que je ne connais pas. Tu as hurlé ta vie à t’en arracher les poumons. Tu as pleuré des larmes de colère et tu as escaladé la montagne des émotions bien plus rapidement qu’une étincelle allume un feu d’artifices.

Pendant 3 longues heures, tu nous a tenus en otage, moi et le reste de la famille, par tes cris stridents et tes coups dans le mur.

J’ai passé par toutes les gammes d’émotions. Je me suis fâchée quand j’ai vu que tu frappais sur tout ce qui se trouvait devant toi. J’ai été épuisée quand j’ai vu que ça faisait 1 heure et demie que tu criais comme ça. J’ai eu de la peine quand tu as dit et répété que tu me détestais et que tu voudrais que je sois morte. J’ai été surprise quand tu as hurlé « Rendez-moi ma liberté! », puis j’ai ri un peu par en-dedans parce que je me disais « voyons donc où c’est qu’elle a pris ça? ».

J’ai été découragée quand j’ai réalisé que ça faisait 2 heures et demies que tu étais en crise et que malgré mes tentatives de discussion, de raisonnement, d’écoute, de solution (pour du ketchup on s’en souvient bien), de punition, de négociation et de médiation, il n’y avait absolument rien pour te calmer.

J’ai fini par lâcher prise au bout de 3 heures. Je me suis assise sur le divan, complètement vidée, te laissant seule avec ta rage dans ta chambre. Tu as fini par te calmer, par toi-même, à ta manière.

Mais si j’ai le cœur brisé aujourd’hui, c’est parce que je réalise pour la première fois que ta crise d’hier m’a marquée plus que les autres fois. Je suis fâchée contre toi. Je pensais pas que ce serait un jour possible d’être aussi en colère contre mon propre enfant.

Ce matin, tu sembles avoir tout oublié de ta crise d’hier et tu m’as sauté dans les bras comme si rien n’était, mais moi, je me souviens de ces 3 longues heures. J’ai eu de la peine et ma limite a été largement dépassée.

Je reste alors seule, avec cette colère contre toi, ne sachant pas quoi faire avec elle. Je continue de t’aimer inconditionnellement, mais pour l’instant, tout ce que je sais, c’est que la prochaine fois que tu voudras du ketchup, tu demanderas à ton père.

Mère Rebelle

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1 réflexion au sujet de « Lettre à ma fille en crise »

  1. OMG!!!! Ca ressemble tellement à chez nous ça :-( Des fois je me demande ce qu’elle a pour faire des crises comme cela… A-t’elle une condition spéciale ou est-ce seulement la gestion des émotions et son caractère??!!?? Depuis qu’elle a 6 mois qu’elle pète des coches et elle a maintenant 6 ans. C’est certain qu’aujourd’hui ses crises sont moins nombreuses mais elle m’a enlevé tout ce que j’avais de patience et d’empathie pour ses crises.
    Une mère épuisée et frustrée des crises (et le papa l’est aussi)…

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