J’ai passé mon enfance à penser que j’étais inadéquate. Bébé, je dormais pas. Enfant, je bougeais tout le temps et j’étais la pire casse-cou. À l’école, je tenais pas en place, je grouillais tout le temps, je recevais des commentaires tels que « ‘sti que tu bouges » ou « t’as-tu des vers dans l’cul? » Yark!
Quand la prof disait mon nom, j’avais l’image du scientifique fou qui lève la tête tout hébété, comme surgi d’une autre planète, avec trois-quatre de ses feuilles de brouillon qui revolent dans les airs.
Je suivais pas. J’entendais pas. J’étais tout le temps perdue. Pis vous savez comment c’était dans les années 90, quand les enfants ne se « comportaient » pas, les adultes gueulaient. C’tait d’même.
Je me demandais comment les autres faisaient, donc, pour toujours tout entendre et tout comprendre? Ça avait l’air tellement simple, pourquoi j’y arrivais pas?
Par contre, j’étais une p’tite bolle. J’avais des 90 partout, je catchais toute en un claquement de doigts et je trouvais donc ben que ça allait pas assez vite à mon goût. J’ai un souvenir du primaire comme étant un cristi de long passage plate à mort. Maudit que je m’emmerdais.
Vous pouvez faire un genre de copier-coller pour mon secondaire, en rajoutant une dimension crissement plus tragique, mais on en reparlera.
À force de réussir les doigts dans le nez, j’ai pas vraiment appris à faire des efforts dans la vie. J’ai pogné un deux minutes au cégep. Fallait donc ben travailler? À l’université, c’était encore pire! Je suis devenue paresseuse. Effort minimal, comme j’avais toujours fait. C’est devenu ma genre de normale.
Fast forward à décembre 2023, quand un psychiatre plus-que-compétent m’a enfin diagnostiqué mon TDAH. Je peux pas dire que je suis tombée en bas de ma chaise, mettons. C’est juste que ça avait jamais été pris au sérieux et j’avais intégré profond la pensée que c’était « pas important » et que je devais « dealer avec ».
Mais là, il m’a proposé une médication. Moi qui avais toujours été incapable de me structurer, d’être productive, de faire de quoi de mes journées, j’avais tellement d’énergie tout d’un coup? Au lieu de tomber vedge après mon premier café, j’étais capable de m’organiser et d’en abattre en sivouplait, de l’ouvrage, en une demi-journée!
Je dis demi-journée parce que l’énergie commençait à dropper tranquillement dès midi. À trois heures, j’étais de retour à mon état de fille assise sur le divan avec son cell et 2-3 emballages de chocolat qui traînent.
En fin de soirée je me disais cristi, j’ai rien foutu tout en essayant mollement de m’activer pour le temps qu’il restait dans une vaine tentative de me déculpabiliser.
Puis, j’allais me coucher avec un cuisant sentiment d’échec.
RINCE AND REPEAT.
Plus récemment, on a décidé d’ajuster mon traitement pour qu’il soit encore plus adapté à ma condition.
Je dois l’admettre : je capote.
Des révolutions de vie, je n’en ai pas connu des tonnes, peut-être 3-4, c’est un statement quand ça arrive.
Mais là, je vous le dis, c’est une révolution.
Je ne suis pas en train de faire l’éloge de la surproductivité, mais quand ta vie depuis toujours c’est d’être effoirée dans le désordre sans être capable de rien faire, ça devient démoralisant. Et là, d’un coup, tu deviens pas une machine, pas Superwoman, juste capable de faire des choses.