Je ne sais pas combien de temps cela faisait que j’attendais ce film-là. Je flânais sur Facebook et j’ai aperçu une bande-annonce d’à peine quelques secondes annonçant un remake de La Belle et la Bête avez Emma Watson. Mes mains ont commencé à taper l’une contre l’autre de leur plein gré, c’est pas mêlant.
On va s’entendre pour dire que le film d’animation réalisé par Disney en 1991 est délicieusement bon. Non seulement on nous présente une fille qui sort des normes, qui a du caractère et qui s’affirme, mais les dialogues reflètent un génie particulier et l’élaboration de la mise en scène du film et l’exécution brillante des dessins créent une fusion particulièrement réussie entre charme, honnêteté et extravagance. Difficile à battre, honnêtement.
Quand on parle de La Belle et la Bête, qu’on l’imagine réalisé avec des êtres humains et non plus des personnages animés, on ne peut s’empêcher de se demander à quoi va ressembler la Bête. Même chose pour tous les objets animés. En tout cas, on pressent que ça relève d’un méchant travail dans le rayon des effets spéciaux. Et, évidemment, on se demande tout de suite à quel point le film sera ressemblant à l’original. Qu’est-ce qui va changer et qu’est-ce qui va être identique. On est comme un peu stressés.
Le film commence avec, bien sûr, l’explication de la malédiction de la Bête. Puis, le titre du film s’affiche avec exactement la même musique que dans le film d’animation. Copie conforme. Un sourire s’étend sur nos lèvres. On est tout excités. On se met à shaker de la jambe d’appréhension. Et là, la chanson des villageois commence. Identique. C’est étrangement satisfaisant. Ça faisait longtemps que Disney ne nous avait pas offert un remake d’un de leurs dessins animés avec les chansons originales. Règle générale, je trouve que ce fût une réussite. Les chansons sont presque entièrement semblables, et seules quelques petites disparités nous font apprécier les revers de l’adaptation. Par exemple, la chanson dans le pub qui glorifie Gaston, personnage joué par Luke Evans avec une singulière précision – son narcissisme fonctionne à merveille et son charme conquérant nous fait encore plus apprécier le fait qu’il est complètement à côté de la plaque (et il est diablement beau, je ne peux pas ne pas le souligner…) –, est festive, bien filmée et fait du sens dans la linéarité du récit. Par ailleurs, les chansons originales, créées pour le film sorti en salles, ajoutent une complexité au récit et viennent corroborer l’esprit plutôt émotionnel du long métrage : par exemple, Evermore.
Je crois que le côté le plus positif du film est l’élaboration des relations entre les personnages et ce, pour presque chacun d’entre eux. Tout d’abord, la relation entre Belle et la Bête fait beaucoup plus de sens à mon avis. En effet, dans le film d’animation, après que la Bête sauve Belle contre la meute de loup, on dirait que leur relation évolue en un clin d’œil et que leur apparente affection n’a eu besoin que de ce coup de fouet pour démarrer. Au contraire, dans le film réalisé par Bill Condon, la relation se développe avec naturel et tranquillité. La Bête, retenue au lit par ses blessures suite à la bataille avec les loups, discute avec Belle de littérature. Sa personnalité, de par l’acuité de ses expressions faciales, se révèle enfin avec parcimonie. C’est aussi intriguant pour le spectateur que pour la jeune femme. Par la suite, une série de moments choisis font avancer avec brio le développement latent de la chimie entre les deux protagonistes. On y croit à cent mille à l’heure. On voit petit à petit que les deux êtres se ressemblent sur plusieurs points et l’humour de la Bête en vient qu’à charmer Belle. Personnellement, j’ai trouvé que le travail scénaristique effectué quant à leur relation est extrêmement bien réalisé et corrobore un esprit qui sous-tend continuellement dans l’adaptation.
Ensuite, la relation entre Gaston et Le Fou est singulièrement différente du film d’animation. Effectivement, dans le film original, on sent clairement que Le Fou ressent de l’admiration pour Gaston, mais que c’est en quelque sorte l’habitude qui les lie. Le Fou se soucie de Gaston et est toujours en accord avec lui. Au contraire, dans le film de Condon, Le Fou ressent clairement des sentiments pour Gaston qui frôlent l’idolâtrie. Ses sentiments amoureux en viennent donc à altérer son jugement et il est donc justifié qu’il se bute contre Gaston à la fin du film.
En ce qui a trait aux servants du château, transformés en objets, je pense que leur exécution est exemplaire et fait bien comprendre le propos. Les interventions des servants sont justifiées et les ornements qui les couvrent sont extrêmement bien réussis. Petite mention spéciale pour les personnages de Lumière et de Big Ben. Par contre, ce qui m’a un peu déçue, c’est l’abus de magie.
Dans le film d’animation, la seule magie qui opère dans le château réside dans l’apparence de la Bête et dans la vie qui crépite dans les objets du château. Ainsi, les objets n’ont pas d’autre pouvoirs que de pouvoir se mouvoir, parler et réfléchir. Le château n’est pas habité par une magie quelconque et bien que les servants, transformés en fournitures, relèvent du surnaturel, ils ne possèdent pas en tant que tel de pouvoirs magiques. Au contraire, le long métrage de 2017 use de magie à plusieurs niveaux. Par exemple, Plumette a la capacité de voler; les ornements sur la robe de Belle sont le fruit des pouvoirs magiques de Madame Garde-Robe, car elle fait fondre des ornements en or dans la chambre, ornements qui viennent s’ajouter à la robe jaune que porte Emma Watson; le château est sempiternellement entouré d’une tempête de neige irréelle qui ne suit pas les saisons ordinaires. Je trouvais donc cet abus de magie sans cohérence par rapport à la malédiction lancée au prince. C’était un peu trop, à mon sens. Et je ne pense pas que ça ne soit nécessaire pour augmenter le côté magique du film : l’histoire est déjà magique en soi.
Enfin, j’ai beaucoup aimé la fin de la malédiction sur le château. Je ne m’étais jamais posé la question à savoir d’où venaient tous les serviteurs de la Bête. Logiquement, certains d’entre eux viennent du village le plus proche, soit celui où habitait Belle. C’est pour cette raison que les retrouvailles à la fin du film m’ont semblé justifiées, voire nécessaires.
Au final, le film La Belle et la Bête de Bill Condon est une grande réussite cinématographique : le scénario intelligent est servi par une direction de la photographie magnifique et efficace, et les effets spéciaux qui couronnent le tout apportent une touche magique – dans le bon sens – à l’ensemble du film. Emma Watson joue bien son rôle de jeune femme déterminée, différente et forte, même si son jeu est peut-être un peu égal. Toutefois, on embarque complètement avec elle dans ses actions et sa douceur corrobore bien la tendresse qui émane de ce personnage.
Reste qu’elle est magnifique dans sa robe jaune. Et que la séquence de danse est tout simplement à couper le souffle. Petits frissons. Petite larme. Ben quoi? On a toujours besoin de garder son cœur d’enfant.
Photographies tirées de Google.