À l’approche d’une révolution qui changera tout le visage de la Russie, la propriétaire du plus beau domaine du pays revient côtoyer ses pairs et ses souvenirs pour une dernière fois. Elle n’a plus d’argent pour racheter sa terre qui est à vendre et ne cherche pas à prendre les grands moyens pour la conserver. Elle sait qu’elle lui échappera, tôt ou tard. Qui peut retenir plus longtemps le changement qui s’impose de lui-même ?
Dans l’endroit familial, il s’installe une ambiance festive. Malgré la faillite, malgré la perte de la maison et du maginifque jardin de cerisiers, malgré la crainte qui s’éveille dans l’attente du moment fatidique du départ et de la fin de la vie, telle que tous l’ont connue. C’est un choix intéressant que d’insister sur cet air ludique, dans un propos aussi dramatique que La Cerisaie de Tchekhov peut l’être. Cela apporte un contraste déstabilisant, mais qui se défend bien. Ce qui dérange un peu plus, c’est l’abus d’un style s’apparentant au vaudeville, soit la recherche excessive de situations pour insérer maladroitement le rire. Qu’on célèbre sa fin, oui… mais avec noblesse aurait peut-être été un peu plus juste quand au ton de la pièce. La distribution a ses failles, mais la plupart des comédiens campent des personnages convaincants et poignants. Le travail physique est minutieusement intégré, mais les performances de danse sont plutôt inconstantes. Alexandre Marine propose ici un univers carnavalesque audacieux peu souvent rattaché à Tchekhov, mais sa version laisse également quelques bavures.
Valery Drapeau