Trou noir : constellation autour de la perte

Trou noir : constellation autour de la perte, Boucle Magazine

Présentée au Théâtre Espace Libre jusqu’au 11 octobre 2025, la pièce Trou noir nous propulse devant la question de la perte : la perte d’objets, la perte de mémoire, la perte d’identité… Car l’unique personnage de la pièce, Edonien, élabore toutes sortes de stratégies pour ne rien oublier de son existence, passant par l’enregistrement de ses pensées, par des notes dans un cahier et des images filmées, puis projetées. Dans une sorte d’Univers, entouré de constellations et d’un trou noir, ce dernier devient une métaphore élaborée pour parler de ce qui mène à la disparition, à l’oubli. Bien qu’un parallèle avec l’Alzheimer peut être fait, il est aussi question de l’envie de se perdre, et de la lumière malgré la noirceur.

Quand on pense à un trou noir, on pense à ce qui attire, ce qui aspire. Moi aussi, je me sentais aspirée par l’ambiance planante de l’œuvre, hypnotisante presque, sensation créée en grande partie par une conception sonore remarquable signée Arthur Champagne et par l’énergie cosmique qui régnait dans la salle.

Trou noir : constellation autour de la perte, Boucle Magazine
Crédit photo: Maryse Boyce

Ce solo performatif, créé par Edon Descollines, devient une autre œuvre de la compagnie Joe Jack et John (JJJ), fondée en 2003. Cette compagnie inclusive et engagée collabore avec des artistes neurodivergents ou en situation de handicap intellectuel, se mobilisant pour faire entendre ces personnes habituellement invisibilisées, peu écoutées et comprises dans notre société, puis aussi dans le domaine théâtral. Depuis 2019, JJJ a un programme de leadership artistique qui permet à des personnes de la diversité d’initier et de diriger leurs propres créations, ce qu’a fait l’artiste avec Trou noir. On obtient alors un grand sentiment de liberté et de sincérité dans leurs œuvres.

L’authenticité au cœur de l’œuvre

Depuis 2022, l’artiste multidisciplinaire Edon Descollines documente sans cesse son quotidien, accumulant son matériel : notes, capture de son, dessins, etc. On découvre ses multiples talents directement en arrivant au Théâtre, apercevant ses œuvres picturales exposées dans l’entrée. On devient témoins de ses pensées; ses enregistrements sont diffusés à plusieurs moments de la soirée, même lorsqu’on pénètre dans l’ascenseur pour monter à la salle du 2e étage. Puis, sur scène, ce sont d’autres facettes de lui qui nous apparaissent; le danseur, le poète et le comédien. Tout au long de la pièce, la ligne reste floue entre fiction et réalité, ayant l’impression d’avoir droit à son journal intime.

La compagnie JJJ souhaite mettre de l’avant l’humain et le placer au centre du travail. C’est ce que j’ai ressenti en regardant cette pièce, d’une durée d’une heure seulement. Je retiens principalement la générosité de l’acteur/créateur et l’authenticité de sa proposition. Malgré quelques manques de fluidité entre les tableaux, j’ai été charmée par son ouverture devant ses tourments, ses doutes, ses vérités, puis par le fait de nous laisser entrer dans son intimité et sa vulnérabilité. Malgré le trou noir qu’il ressent dans sa tête, il réussit à laisser passer la lumière, à refléter le beau de l’existence.

« Je suis poussière d’étoiles. Je deviens un bébé naissant, je deviens un enfant, un adolescent, un adulte et une personne âgée. Je redeviens adulte, adolescent, enfant, bébé naissant, jusqu’à ce que j’oublie nos origines. Je redeviens poussière d’étoile, qui brille et qui pleure. » – Edonien

Trou noir : constellation autour de la perte, Boucle Magazine
Crédit photo: Maryse Boyce

Trou noir est présentée jusqu’au 11 octobre, au Théâtre Espace Libre. Il vous reste peu de temps pour aller découvrir cette œuvre remplie de sincérité. Pour les billets, c’est par ici.

Crédit photo de couverture : Maryse Boyce

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