Enfin le printemps est à nos portes ! Petit à petit la température se réchauffe et qui dit printemps dit ménage et renouveau. C’est donc avec grand plaisir que je sors de mon hibernation pour vous partager mes lectures en ce début de saison.
Le silence des braises – Alec Serra-Wagneur
Cette œuvre, comportant huit nouvelles, porte en trame de fond la figure du feu. Inspirantes et réconfortantes, ces histoires nous emportent au cœur de la nature, dans des espaces où les personnages ont pour seule compagnie leurs souvenirs et leur conscience. Profondément psychologique, ce recueil nous plonge dans les histoires de personnages qui tentent de se reconstruire, face à des drames passés. Leurs blessures ainsi que la force de leur douleur jaillissent sous la forme de braises brûlant tout sur leur passage. Longtemps silencieuses et enfouie au creux des individualités, c’est à travers leur omniprésence que l’auteur nous permet de comprendre le poids du silence.
« Mon regard se perd dans la danse des flammes […] pour la première fois je sens que ce poids commence à s’alléger. Que la douleur disparaît comme ces milliers de points rouges qui s’envolent du brasier en craquant, puis s’évanouissent sous le ciel où les étoiles commencent à poindre timidement »
Le silence des braises, Alec Serra-Wagneur, p.61
Art – Yasmina Reza
Dans un autre registre, cette pièce de théâtre est incroyablement originale. Portant sur l’art, c’est l’histoire de trois amis dont l’un vient d’acquérir une toile qui ne fait pas l’unanimité. Ces trois personnages étonnants m’ont autant frustré par leur caractère borné que par leur comportement conflictuel. Toutefois, leur entêtement à vouloir faire valoir leur point de vue laisse place à des scènes totalement hilarantes. La toile étant l’objet les réunissant, l’œuvre pose des questionnements pertinents sur l’art : valeur monétaire, prestige de l’artiste, institutionnalisation, déconstruction, valeur esthétique, etc. C’est également une pièce qui porte sur l’importance des mots et la malléabilité du langage. Enfin, plus que l’apport artistique, il est surtout question d’une amitié qui s’effrite et qui s’efforce de perdurer.
« Agresse-moi, agresse-moi encore !… J’ai peut-être une hémorragie interne, j’ai vu une souris passer.
-C’est un rat.
-Un rat!
-Oui, il passe de temps en temps.
-Tu as un rat ?!!
-Ne retire pas la compresse, laisse la compresse. »
Art, Yasmina Reza, p.96
La signature rouillée – David Beaudoin
Roman pluriel par son mélange des genres romanesques, cette œuvre est intrigante. Ce récit raconte l’histoire d’Antoine G, peintre québécois vivant à Paris. Restaurateur de peintures, son quotidien sera chamboulé par la toile sur laquelle il travaille. Victime de vandalisme, il tentera de la restaurer en lui redonnant sa vitalité, tout en s’impliquant profondément et personnellement dans son histoire. Sentant un lien se créant entre lui et la femme présente sur cette toile, il voudra comprendre comment son histoire est liée à celle de l’œuvre. Voyageant dans le passé, plus précisément lors du sauvetage des malades de l’hôpital de l’Ancienne Charité à l’époque de l’inondation de la Seine en 1910, il fera rapidement le lien avec le vandalisme et l’histoire de la toile.
« Dans les médias, on avait beaucoup parlé de celui qui avait vandalisé le tableau du musée Carnavalet. Un chroniqueur l’avait désigné comme l’homme à la signature »
« La Seine, chaque fois qu’il l’a voyait, lui paraissait à la fois différente et toujours semblable […] La probabilité qu’une véritable inondation se produise, contrairement à celle de 1910 qu’il percevait dans ses visions, l’inquiétait de plus en plus »
La signature rouillée, David Beaudoin, p.25, p.69
Que ce soit par l’exploration de la nature chez Alec Serra-Wagneur, les relations sociales avec Yasmina Reza et le lien étrange s’opérant entre une œuvre et son spectateur avec David Beaudoin, ces lectures nous plongent dans notre propre intériorité.
J’espère qu’elles vous plairont.