Pour les grands lecteurs et les amoureux des livres, vous savez que l’automne est une saison qui est propice à la lecture. L’obscurité, les jours de pluie et le froid qui s’installe nous invitent tranquillement à nous créer une atmosphère cocooning. Alors pour ce mois de la rentrée, je vous invite à explorer deux œuvres qui nous font réfléchir à des enjeux importants. Il est souvent nécessaire de se tourner vers les littératures étrangères pour s’ouvrir à la diversité, autant par la culture que par les thématiques abordées. Pour moi, l’automne est la saison de la découverte, une saison dans laquelle je me plais à explorer des œuvres d’autres horizons.
C’est également l’occasion pour moi de vous présenter la littérature de chez moi : la littérature maghrébine, avec une œuvre algérienne et une œuvre marocaine.
Harraga, Boualem Sansal
Commençons par le livre Harraga de Boualem Sansal. Écrivain algérien très critique, ses œuvres parlent de la société algérienne en mettant le doigt sur des sujets qui divisent. Dans ce livre, Sansal raconte l’histoire de Lamia, jeune dame célibataire et pédiatre, qui doit vivre malgré la disparition de son frère Sofiane. Devenant un Harrag (migrant clandestin), il part sans prévenir en laissant à sa sœur le soin de s’occuper d’une jeune femme enceinte qu’elle ne connaît pas. Quittant son pays pour aller vers l’Europe, il représente les jeunes africains qui fuient leur pays dans l’espoir d’un avenir meilleur, ailleurs que chez eux. Lamia, le personnage principal, représente quant à elle les citoyens qui, impuissants et sans nouvelles de leurs proches, restent au pays et résistent en espérant un retour inespéré. Une lecture toujours d’actualité qui offre un portrait sur la situation des jeunes maghrébins et de leurs proches et qui nous amène à comprendre ce que vivent ceux qui restent et comment il est difficile pour eux d’accepter l’inacceptable : la solitude et la perte d’un être cher.
« Un matin, à la pointe du jour, il est parti. Par la route de l’ouest, la plus dangereuse, Oran, la frontière, le Maroc, l’Espagne, puis de là, la France, l’Angleterre, ailleurs, tel est le programme »
Harraga, p. 52
« Comme si nous n’en savions pas assez, les harragas ont inventé pour nous de nouvelles façons de mourir. Et ceux qui réussissent la traversée perdent leur âme dans le pire royaume qui soit, la clandestinité. »
Harraga, p. 53-54
Le parfum des fleurs la nuit, Leila Slimani
Ensuite, parlons du livre Le parfum des fleurs la nuit de Leila Slimani. Cette œuvre, qui se présente sous la forme d’une autobiographie, nous amène dans le registre de l’intime. Slimani nous amène à questionner le pouvoir de la littérature et à explorer ce que nous communique notre propre réflexion : « Écrire, c’est jouer avec le silence, c’est dire, de manière détournée, des secrets indicibles dans la vie réelle. ».
Pour l’autrice, l’écriture est audace et nous permet d’exprimer notre authenticité à travers la littérature, qui pose un questionnement constant sur soi, sur notre individualité. Écrivant ce livre en passant une nuit complète enfermée dans un musée en Italie, elle nous amène également à questionner notre rapport à l’art et à la solitude. Ayant choisi de manière volontaire la solitude, elle explique que l’enfermement peut nous amener dans des endroits qu’on ne soupçonnait pas l’existence. C’est la possibilité de se retrouver dans le silence et y trouver un espace de création, un lieu où il suffit d’écouter sa propre voix pour faire vivre ce qui se cache au fond de nous, dans notre imaginaire : « La réclusion m’apparaît comme la condition nécessaire pour que la Vie advienne. Comme si, en m’écartant des bruits du monde, en m’en protégeant, pouvait enfin émerger un autre possible. Un « il était une fois » ». (p. 15)
« Souvent, on me demande ce que peut la littérature. C’est comme demander à un médecin ce que peut la médecine. Plus on avance et plus on mesure notre impuissance. Cette impuissance nous obsède, nous dévore. On écrit en aveugle, sans comprendre et sans que rien soit explicable »
Le parfum des fleurs la nuit, p. 68
Par la question de l’intime et de la solitude, ces ouvrages nous amènent à nous questionner sur notre propre réalité et sur ce que d’autres subissent ailleurs. J’espère qu’elles vous inspireront et vous donneront matière à réflexion!
Bonne lecture!