C’est la semaine dernière que le groupe montréalais Debate Club lançait Phosphorescent, un premier album post-rock garage habilement réalisé par Jean-Michel Coutu (Jesuslesfilles, Crabe) qui fait suite à Fish Fry, un deuxième EP paru en 2017. D’abord amorcé par les amis de longue date Francis Roy (guitare) et Philippe Hamelin (voix, guitare), le projet, auquel s’est joint Alexandre Aubut (batterie) et Alexandre Martel (basse) prend forme en 2012. Debate Club, c’est l’approche instinctive de quatre visions distinctes qui tiennent leurs influences tant dans le rock des 60’s (Velvet Underground) et des 80’s (Brian Jonestown Massacre), que dans la scène garage / psych québécoise des années 2000 (The Sunday Sinners).
Alors qu’une période d’apprentissage a été nécessaire entre la formation du groupe et son premier enregistrement, les quatre membres on su façonner leur son et se servir de l’énergie du moment pour offrir un premier opus bien ficelé, qui laisse entrevoir le meilleur pour la suite. On a profité de la sortie de ce premier album pour discuter avec Francis et Philippe du processus créatif du groupe, ainsi que de cette nouvelle proposition disponible depuis le 25 octobre sous Michel Records.
Boucle Magazine : Diriez-vous que les influences et visions distinctes de chacun apportent quelque chose de plus au groupe ?
Philippe : C’est vraiment le concept de band que j’aime le plus. C’est-à-dire que tu as des groupes où il y a toujours une tête pensante, un leader, et ça donne une ligne directrice dans plein de bons côtés. Mais nous, on essaie plutôt de faire un cumulatif du travail de chacun. Ça rend notre processus décisionnel super long, super compliqué, parce qu’on essaie tous d’avoir notre mot à dire. C’est un peu ça l’idée de la formation. […] On s’amuse. Souvent, je vais amener une idée et on va la déconstruire ensemble pour la reconstruire.
Francis : On donne la chance à tout le monde dans la composition et on essaie chaque idée, même si on est moins sûr.
BM : Comment ça se passe un jam dans le local de Debate Club ? Est-ce que c’est l’endroit où justement, vous amenez toutes vos idées ?
Francis : En ce moment, c’est le lancement qu’on roule pas mal, mais en temps normal, ça commence toujours par un jam la plupart du temps. Phil fait des démos chez lui, il enregistre sur son téléphone et il nous envoie ça durant la semaine. Des fois on l’écoute et on peut partir sur quelque chose de complètement différent.
Philippe : Il y a vraiment eu une progression. Au début, on était dans le concept de jam et on y allait avec le feeling et ça ne donnait absolument rien, on se regardait dans le blanc des yeux, il n’y avait rien qui se passait, mais aujourd’hui ça se passe ! Je trouve que ce qui sort de là, c’est vraiment meilleur quand on arrive avec un démo, qu’on le déconstruit et qu’on le refait.
BM : Vous avez renouvelé votre collaboration avec Jean-Michel Coutu, qui avait également participé à votre dernier EP Fish Fry en 2017. Il y avait le désir de conserver une ligne directrice pour l’album ?
Philippe : Je pense qu’on ne voulait pas nécessairement reprendre la même direction. Jean-Michel a vraiment une bonne approche avec les bands et je pense que la plupart des groupes avec qui il travaille on ce commentaire. Il est capable d’écouter, de prendre un peu de recul et de dire, « je pense qu’on s’en va là ».
Francis : Il sait quoi dire au bon moment. C’est un amour ce gars-là ! Il ne va pas trop s’immiscer dans le projet, mais juste assez. Il a vraiment une bonne oreille.
BM : Vous décrivez Phosphorescent comme un album qui parle de transitions et de prise de conscience. Quelle a été cette prise de conscience ?
Francis : La trentaine ! (Rires)
Philippe : Ça sonne toujours un peu quétaine, mais oui, il y avait définitivement quelque chose de ça. Il y a une époque où les choses étaient différentes et tranquillement pas vite, elles on changées et les chansons sont devenu d’autres types de chansons… tout ça ensemble formait un tout cohérent.
Francis : J’aime penser à ce feeling qu’on a quand on est enfant. Sur la pochette, on voit un jeune de 14 ans qui enfourche un vélo et il se dit « let’s go, c’est cool ! » Il y a cet espèce de joie là de retrouver ce qui t’animait quand tu avais cet âge et que tu as peut-être perdu au fil des années parce que tu as divergé ici à gauche et à droite pour différentes raisons et un moment donné, tu te recentre et tu te demandes « qu’est-ce que j’ai besoin, qu’est-ce qui me fait vraiment plaisir, qu’est-ce que je veux faire, comment je veux le faire et où est-ce que je veux aller ». Se recentrer, sans tout couler dans le béton, ça se fait avec certaines transitions. Alors les thèmes abordés dans les chansons et la construction de l’album représentent ça aussi. Quand je disais que tout s’est placé seul, comme ça, bien aujourd’hui on a Phosphorescent. Il n’y a rien qui a été laissé au hasard, et il n’y a rien qui a été calculé aussi.
BM : On parlait de l’importance de définir un son. Est-ce que selon vous, c’est encore nécessaire aujourd’hui de mettre une étiquette sur la musique ?
Philippe : Je pense que c’est important dans le sens que ça définit peut-être le public qui va être intéressé et en tant qu’auditeur, peut-être que ça aiguille ton choix. […] Tous les bands incorporent un minimum d’influences dans ce qu’ils font, c’est pour ça que pour nous, mettre une étiquette sur un son, on trouve ça difficile. Tu peux avoir une chanson qui est plus comme ça, une autre qui sonne comme autre chose… C’est important ? Oui, probablement. Est-ce que ça change quelque chose ? Probablement pas.
Francis : C’est de se mettre des barrières et pour être capable de bien composer, il faut que tu sois capable de faire sauter toutes les barrières possibles et ça, c’est vraiment difficile.
BM : Y a-t-il des choses que vous aimeriez développer ou explorer prochainement ?
Francis : Pour l’instant, il y a plein d’enregistrements de cellulaire qui dorment que j’ai vraiment hâte d’ouvrir et de travailler. On a juste le goût de recommencer à jouer de la musique. Là, c’est le fun, on pratique, on va faire des shows et on a bien hâte, mais les moments dans le local où est-ce qu’on commence quelque chose de nouveau et où on évolue, c’est irremplaçable. On a quelques chansons qui s’en viennent et je pense que ça va être cool !
Si à cela s’ajoute l’envie de jouer un peu partout, tant en salle que dans les festivals, on a déjà hâte d’entendre ce que nous réserve le groupe dans le futur. D’ici là, on écoute Phosphorescent sans modération, disponible en format numérique et vinyle, et on ne manque pas le lancement montréalais de l’album le 1er novembre prochain au Quai des Brumes, dont la première partie sera assurée par Penny Diving. Pour être au courant des prochains spectacles, abonne-toi aux pages Facebook et Instagram du groupe !
Photo de couverture : Debate Club, Crédit photo : Antoine Wibaut