Quand on essaie de faire un bébé, on a tendance à psychoter, à être beaucoup trop à l’écoute de notre corps, à analyser le moindre symptôme, à harceler notre intuition.
Ben pas moi. La fois où je suis tombée enceinte, j’ai eu tout un tas d’indices, mais je les ai cordialement ignorés. Comme quand j’ai commencé à avoir envie de pipi tout le temps. Au point où je me suis dit ben voyons. Au point où je me suis dit lol, mes collègues vont penser que j’ai la diarrhée.
Mais je ne me suis pas dit : OMG, JE DOIS ÊTRE ENCEINTE. Il était beaucoup trop tôt pour que ça veuille dire quoi que ce soit de toute façon.
Puis, ça a été l’appétit. J’étais quand même habituée. Qui n’a pas un gros appétit en SPM? On va se le dire, c’est quand même assez courant. Mais là, on aurait dit que c’était pire que d’habitude. C’était dévorant. Raging. Animal. J’avais pas de fond. Juste pas. Et d’habitude, ce symptôme dure trois ou quatre jours, pas plus. Certainement pas deux semaines.
Alors quand je me suis commandé une immense poutine au marché Jean-Talon et que je l’ai engloutie d’un coup sans me poser de questions, je me suis dit ben voyons. Ça n’arrivait jamais. Je m’arrêtais toujours à la moitié, pleine à craquer et sur le bord d’exploser. Là, j’avais encore faim.
J’ai pris une photo de mon plat vide pour immortaliser l’événement dans un statut Facebook. Au début, ma caméra était du mauvais bord et j’ai fait le saut parce que quand je me suis vu la face, j’ai réalisé que j’avais une belle peau radieuse et parfaite à un moment où j’aurais dû être pleine de boutons.
Mais je ne me suis pas dit je suis enceinte. J’étais trop occupée à chercher une nouvelle façon de satisfaire mon appétit sans fin.
Deux ou trois jours plus tard, j’étais assise sur mon lit et d’un coup, j’ai brusquement commencé à me sentir beaucoup plus zen. Tous mes soucis habituels ont subitement baissé d’une coche ou deux et je trouvais la vie terriblement plus douce. J’étais mindblown, mais je ne crois pas vraiment à tout ce qui est ésotérique. Alors j’ai mis ça sur le dos du poush-poush à la lavande que j’avais vaporisé sur mon oreiller quelques minutes plus tôt.
Ensuite, on est allés souper chez mes beaux-parents. Je me sentais bizarre. Fatiguée, un peu nauséeuse. Je n’ai pas pris d’alcool de la soirée, pas parce que je me croyais enceinte mais simplement parce que je ne le sentais pas. Les autres me regardaient d’un air suspicieux, ce à quoi je coupais court en rétorquant non, vraiment pas.
Trois jours plus tard, je me suis réveillée un matin avec des petites crampes. Je me suis dit ça y est, c’est foutu et je suis allée me chercher une grosse crème molle.
Ce soir-là, juste avant de me coucher, j’ai eu un petit mal de coeur comme si j’avais mangé quelque chose de passé date. J’ai blâmé le stress et la crème glacée.
Le lendemain matin, comme une nouille, probablement pour faire diminuer mon niveau d’anxiété et en me disant mais t’es vraiment conne de te faire du mal comme ça, j’ai décidé de faire un test de grossesse.
J’avais travaillé fort ces deux dernières semaines pour ne pas trop me faire d’idées et je m’apprêtais à gâcher tous ces beaux efforts.
Ceux qui ont déjà utilisé un test de grossesse savent comment ça fonctionne, la fenêtre du test devient d’abord toute rose à mesure que le liquide progresse dedans, puis le rose commence à s’estomper pour laisser place à une ou deux lignes. Une ligne, négatif, deux lignes, positif.
Donc le rose s’est estompé et la première ligne est apparue, jusque-là, rien d’anormal.
Mais une deuxième petite tache rose pâle tardait à s’estomper. Une tache dont les contours s’effaçaient progressivement, qui ressemblait de moins en moins à une tache et de plus en plus à une ligne bien définie. Une deuxième ligne. Rose. Dans les temps et à la bonne place.
Je commence ma 37e semaine aujourd’hui.