Gens adultes de cette Terre, je vous en conjure, cessez d’avoir honte de regarder des films d’animation. J’ai toujours cette petite frustration lorsque les clients au Superclub Vidéotron arrivent à la caisse avec trois films d’animation, me les tendent avec un sourire gêné et se sentent obligés d’ajouter, comme une excuse : « Ce n’est pas pour moi, évidemment, c’est pour mes enfants. » Puis, ils me regardent avec ce sourire entendu.
Gens adultes de cette Terre, vous vous méprenez. Lorsqu’un adulte loue des films d’animation, je ne réagis pas autrement qu’avec les autres films. Les films d’animation ne sont pas une sous-catégorie de films. C’est une honte que les films d’animation soient bien souvent classés dans une section « enfants ». Quoi, tous les autres films sont pour adultes? Foutaises.
Si vous saviez le nombre d’heures et le talent qu’il faut pour exécuter un film d’animation. Laissez-moi éclairer vos lanternes. Il y a certes l’animation 2D, avec laquelle tout le monde se familiarise dès l’enfance. Exemples : tous les premiers films de Disney. Ce sont des dessins qui défilent un par un, à vive allure, et qui créent l’illusion du mouvement. MAIS. Il y a également l’animation 3D, animation la plus en vogue de nos jours et qui est maintenant la technique la plus répandue chez Disney Pixar et Dreamworks. Quand je dis 3D, je ne parle pas de petites lunettes « fancy » et d’images qui sortent de l’écran. L’animation 3D est complètement faite à l’ordinateur et requiert des logiciels spéciaux qui vous permettent de créer des personnages et des décors en 3D dans lesquels vous pouvez « tourner » votre film, tel que ce fut le cas pour Raiponce. Voilà, nous sommes maintenant sur la même longueur d’ondes.
Ouvrez le logiciel d’animation 3D. Prenez une forme géométrique, par exemple un cube. Du cube, faites des subdivisions et modifiez leur forme. De ces subdivisions, créez le corps de Raiponce. Ajoutez-lui un squelette et donc des contraintes de mouvement : par exemple, le coude ne se plie pas de l’autre bord. Ajoutez des textures ultra réalistes sur le corps. Tada. Magie. Vous avez créé le personnage de Raiponce. Laissez-moi vous dire que ce n’est pas chose aisée. Ci-joint, mon premier essai de modélisation dans un logiciel 3D. De toute beauté.
Je vais également éclaircir un point avant de me lancer plus avant dans le merveilleux univers de Raiponce. Les films de Disney, on les regarde dès l’enfance. Et on les regarde encore une fois adulte. Moi, je fais ça, en tout cas. De un, c’est un bon souvenir; de deux, il y a des blagues pour adultes et des mots que je n’avais pas compris étant jeune cachés un peu partout (soyez avertis); de trois, ce sont des excellents films. J’ai terminé.
Ce qui m’amène à parler de mon film d’animation préféré, genre, ever. La folie de La reine des neiges, je n’ai jamais compris. Loin de moi l’idée de rabaisser ce film, mais j’ai grincé des dents à quelques reprises. Mais bon, je m’éloigne du sujet. À mon humble avis, le film Raiponce est sans nul doute le plus grand chef d’œuvre qui soit sorti des studios Disney (pas très loin de La belle au bois dormant, mais là, on replonge dans une vieille histoire d’amour d’enfance…). Raiponce, c’est tout simplement du pur génie. Quand j’ai loué ce film à sa sortie, je pense que j’ai dû le regarder quatre fois dans la même semaine. J’ai été comme fascinée.
Premièrement, la qualité des images de synthèse est, à mon sens, d’une rare ingéniosité. La quantité de détails dans chaque plan est purement phénoménale. Je peux vous nommer nombre d’exemples : la tour où habitent Raiponce et Mère Gothel, complètement couverte de peintures; les expressions faciales des personnages, si proches de la réalité; l’attention aux petits détails qui rendent le film si réaliste; le mouvement parfait des tissus; et, évidemment, le génie qui se cache derrière l’animation des cheveux de Raiponce. Étant en couple avec un animateur 3D, j’ai eu la chance de découvrir toute la complexité de cet univers si riche en possibilités et en situations complexes. Comme les cheveux, notamment. Rappelez-vous combien de cheveux nous avons sur la tête. Il faut créer des filaments à partir du cube et leur ordonner d’agir comme des cheveux. Probablement la chose la plus difficile à faire en animation 3D, au dire de mon amoureux. Dès que vous faites une erreur, tout explose.
Ensuite, la scénographie en général dans le film est à en couper le souffle. Les décors sont multiples et extrêmement détaillés. L’éclairage est varié, très réaliste encore une fois et recherché. Notamment, lors de la chanson N’écoute que moi, l’éclairage est tellement multiple et complexe que ça me donne le tournis. Douches, chandelles et flammes, fenêtre, lanterne : tout y passe, donnant une impression de chaos organisé tout à fait en symbiose avec la psychologie du personnage. Raiponce est effectivement manipulée depuis l’enfance par sa tortionnaire et maintenue dans une ignorance naïve. C’est d’ailleurs cette naïveté qui rend le personnage si charismatique et attachant.
Je crois que c’est d’abord et avant tout les personnages qui sont à l’origine du succès du long-métrage. Ils sont tous extrêmement attachants et profonds. Raiponce est très naïve et néanmoins fonceuse et courageuse. Elle est confrontée à des choix tout au long du film et évolue continuellement pendant son périple. Flynn Rider, quant à lui, est un voleur qui se complait dans le crime pour palier à une vie triste et misérable d’orphelin. Sa coquille sera peu à peu brisée par la sincérité de Raiponce et il est, il faut le dire, absolument magnifique. J’imagine cet homme dans la réalité et j’avoue le trouver p-a-r-f-a-i-t. Petite anecdote : « [l]e design final de Flynn a été élaboré au cours de sessions appelées « Hot Man Meeting », réunissant une trentaine de femmes travaillant sur « Raiponce » qui étaient encouragées à amener des photos d’hommes qu’elles trouvaient « plaisants »[1]. » Enfin, il y a le personnage de Mère Gothel que l’on déteste à prime abord et qu’on apprend à comprendre et à apprécier (mais qu’on continue de détester). Elle possède tout un caractère et c’est autant sa folie vengeresse que son humour décalé qui font de ce « vilain » un des personnages clés du film. Et certainement un des plus complexes. Mention spéciale à Pascal et Maximus, respectivement le caméléon apprivoisé de Raiponce et le cheval du commandant de la garde du roi, qui sont absolument parfaits et qui rendent bien leur rôle de « stand-up comiques ». Je les a-d-o-r-e. Bravo aux animateurs. Et merci beaucoup.
Au final, l’histoire reste tout de même la principale raison de la réussite du film. Tous les petits détails sont cruciaux. Et géniaux. Les personnages sont attachants et brillamment animés, les décors sont superbes et l’histoire a une profondeur avec un trait d’humour caché dans les détails qui permet au film de s’élever au rang de chef-d’œuvre, selon mon humble avis. Regardez-le encore et encore et encore, sans jamais vous sentir coupable. Les films d’animation, c’est pour tout le monde. Et pour ceux qui trouvent les histoires trop simples et enfantines, amusez-vous à décortiquer les personnages, les motivations des protagonistes et la structure du récit. Comparé à certains autres films qu’on considère « adultes », Raiponce possède une complexité beaucoup plus grande.
Gens adultes de cette Terre, lorsque vous louez un film d’animation au Superclub Vidéotron, dites-vous que ceux qui y travaillent ne vous jugent pas. Ils savent à quel point ce sont tous des chefs-d’œuvre artistiques.
Ci-joint : une vidéo très intéressante sur les étapes de création d’une scène. Vous verrez vraiment à quel point c’est impressionnant! https://www.youtube.com/watch?v=l-S7wQx_hvs
[1] Wikipédia : L’encyclopédie libre. (2016). Flynn Rider. Repéré à https://fr.wikipedia.org/wiki/Flynn_Rider
Photos tirées de Google.