C’était un matin ordinaire, c’est-à-dire un matin où personne veut s’habiller, les enfants se crient après, un matin où y’a du pain, des céréales, des fruits, du yogourt, des oeufs pour déjeuner mais que mon fils veut absolument du gruau. Tu vois le genre de matin?
Et bien à travers cette ambiance digne d’un chaos dirigé par l’orchestre symphonique de Montréal, je devais relever le défi de me faire maquiller par mes enfants et passer la journée avec le résultat.
Je dois dire ici que je ne me maquille jamais. JAMAIS. Alors mon stock de maquillage provient uniquement de ma mère (qui me dit subtilement que je devrais sûrement me maquiller) et qui date de plusieurs années. J’étale le coffre aux trésors sur la table, parce que c’est ça que c’était pour mes enfants : un trésor, et là, l’ambiance a changé du tout au tout. La mauvaise humeur matinale a fait place aux rires et à la complicité dont je ne soupçonnais pas l’existence dans ma famille.
Je me suis fait barbouiller par mes trois enfants dans la joie et l’allégresse. Aucune règle n’existait, juste de la belle couleur là où ça leur tentait. C’est ce qui explique que du fard à paupière s’est retrouvé sur mes joues et du eyeliner en dehors de mes yeux. À la fin, j’avais beaucoup de brun et de vert partout dans le visage et des lignes d’eyeliner un peu partout. Et du rose sur les lèvres.
Après la période de plaisir, ils sont partis et j’ai dû faire ma journée. Journée dans laquelle j’avais des rendez-vous et des sorties à faire.
Tant que je restais à la maison, c’était assez facile, mais quand j’ai mis le pied dehors, tout de suite les regards me dévisageaient. Tu sais juste le second regard de côté qui veut dire : J’ai-tu bien vu ? Oui, oui.
Je riais intérieurement, mais les moments les plus drôles ont été quand j’ai été obligée d’entrer en conversation avec les gens. La fille derrière le comptoir savait pas si elle devait rire ou rien dire. Je voyais dans ses yeux qu’elle se disait : Mais d’un coup qu’elle se maquille vraiment de même la madame?
Puis mes rendez-vous dans la journée. Il a fallu que j’explique le pourquoi du comment, mais ils ont été bons de rester concentrés sur ce que je disais malgré ma face toute barbouillée. Ma crédibilité n’a pas été ébranlée ! Ma réputation est saine et sauve !
En bout de ligne, quand je repense à cette journée, ce que j’aime le plus, c’est de voir le plaisir et le soleil que ça a mis dans mon matin familial. Une folie que j’ai pas assez dans mon quotidien et qui fait que tous les jours se ressemblent et se vivent dans le stress de toujours aller à la chose suivante. Lève-toi. Habille-toi. Mange. Brosse tes dents. Mets ton manteau on s’en va. Viiiiiite on va être en retard!
Ce matin-là on a eu du fun. Puis le reste de la journée ? Ben je l’ai passée à pousser mes propres limites du ridicule. Cette peur ancrée en chacun de nous qui vient avec la peur de faire rire de soi et de se faire rejeter. J’ai dealé avec toute la journée et ça m’a fait un grand bien de voir que rien n’est arrivé. Je suis pas niaiseuse pour autant, je le sais ben que j’ai fait rire la gang d’ados assis sur le banc de parc quand j’ai passé à côté d’eux, mais sais-tu quoi ? Tant mieux s’ils ont ri, la vie n’est pas si sérieuse que ça ! On peut en rire et on peut rire de soi ! Amenez-en d’autres défis !
Mère Rebelle
*Crédits photo pour l’image de l’article : Mc Knoell Alexis