Avoir une progéniture. Créer un être humain avec quelqu’un d’autre et lui montrer la vie du mieux possible. Se demander ce que sera le monde lorsqu’il sera vieux/vieille. Avoir un enfant, quand on y réfléchit bien, peut être une idée absolument terrifiante. Cette question primordiale est exactement à la base de la pièce Des arbres présentée au Théâtre La Licorne jusqu’au 30 avril.
Un homme évoque à sa copine l’idée d’avoir un enfant, entre deux rangées du IKEA. Elle, qui n’y avait jamais pensé sérieusement, pète un plomb. Juste le concept la fait angoisser, parler trop vite et fumer à répétition. Pourtant, la discussion passée, la question reste. Devraient-ils avoir un enfant? Sont-ils des assez bonnes personnes pour servir d’exemple à une autre? Mais aussi, réfléchir à procréer, c’est songer à tout le reste. Le couple, soi-même, la société, la pollution, les problèmes mondiaux. Plus jeune, on prend ce genre de possibilités pour acquis. « Un jour, j’aurai sûrement des enfants. » Mais lorsque l’âge avance et que les conditions sont là, il est normal de paniquer. Paniquer sa vie même.
Sophie Cadieux et Maxime Denommée interprètent donc ce couple en questionnement. Seuls sur une scène dénudée, ils réussissent à nous transmettre les peurs de leur personnage avec la seule puissance du texte de Duncan MacMillan. L’auteur, en provenance d’Angleterre, a su dépeindre l’histoire de ce couple avec humour et réalisme. Les nombreux sauts temporels dans la narration prêtent à confusion au début, mais on s’y habitue rapidement. Benjamin Pradet a exécuté un travail de traduction et d’adaptation admirable, car les dialogues sont près de la réalité québécoise et ne sonnent pas faux. Le texte touffu et souvent formulé à une vitesse folle par Sophie Cadieux, parait naturel.
Sophie Cadieux est une femme de théâtre qui sait faire chavirer autant que rire et sa performance dans Des arbres a su combler mes hautes attentes. En femme sur le bord de la névrose, elle est touchante et tellement vraie. Maxime Denommée se démarque aussi, mais le personnage plus flamboyant joué par Cadieux vole un peu la vedette. L’absence de décors ne dérange pas, tant le texte et les performances suffisent à faire ressentir et imaginer. La musique de Guido Del Fabbro s’avère toutefois être un excellent complément. Jamais envahissante, la bande-sonore représente les émotions du couple aux bons moments. En bref, jetez-vous sur les billets de Des arbres avant qu’il n’en reste plus. Une pièce à voir absolument.
Amélie Lacroix Maccabée