La pièce Les Paroles de Daniel Keene, mise en scène par Alix Dufresne, est présentée du 21 octobre au 1er novembre au Théâtre Prospero. Mettant en vedette Rachel Graton et Marc Béland, elle est une production de la compagnie J’le dis là.
Deux pèlerins, le corps courbé par la fatigue et la faim, s’échinent à transporter leurs possessions de ville en ville en espérant trouver un endroit pour eux. Un endroit où ils ne seront pas invisibles, indésirables. Lui, absorbé par sa croyance en Dieu et elle, par son amour pour lui. Il professe sa foi de lieu en lieu sur les places publiques sans jamais trouver d’auditeurs intéressés. Tout ce qu’il désire, c’est que les gens l’écoutent. L’argent l’importe peu, pas plus que la célébrité. Ensemble, ils rêvent de jours meilleurs, de nourriture chaude et de réconfort. Tout ce qu’ils ont, c’est l’espoir d’un mieux pas trop lointain. Pourtant, ils ne cessent jamais de croire en leurs convictions malgré les embûches.
Sur une scène nue couverte de sable, les deux acteurs traînent une lourde boîte, habillés sobrement de vêtements sans âge. Sales, les corps tordus, leurs discours se mêlent souvent à des mouvements de danse contemporaine afin d’exprimer la foi et les sentiments de leurs personnages. Marc Béland et Rachel Graton exécutent ici, malgré la brièveté de la pièce, des rôles très physiques. Ils sont tous deux très forts dans ces rôles difficiles. Leurs démarches et leurs gestes montrent autant ce que vivent leurs personnages que leurs paroles. La scène, enfumée et sombre, n’illumine qu’eux. Elle forme une croix lumineuse très emblématique vers la fin de la pièce.
Leur récit est situé dans une temporalité inconnue. Mis à part une petite référence, tout ce dont ils discutent pourrait appartenir à n’importe quelle époque. Leurs questionnements perpétuels sont ceux qu’ont pu vivre des gens du Moyen-âge comme ceux d’aujourd’hui.
Cette pièce, plus que sur la pauvreté ou un couple, est une pièce sur Dieu. Dans une société où Dieu et les religions sont pratiquement évacués de nos vies, cette réflexion sur la foi est bouleversante. De voir ces personnages prêts à tout pour partager leur amour de Dieu, laissant de côté le confort matériel et la facilité, est réellement fascinant. La colère et les souffrances qu’ils ressentent sont palpables. Quoique je sois sortie de cette pièce un peu perturbée et perplexe, Les Paroles émet des interrogations sur plusieurs sujets pertinents, peu importe les pays et les époques. Il n’est pas évident de capter tous les messages que cette pièce envoie tant elle est symbolique, mais ses propos sont intéressants en plus d’offrir des performances remarquables de ses interprètes.
Une pièce à voir au Théâtre Prospero dans la salle principale jusqu’au 1er novembre 2014.
Pour plus de détails, visitez le site web du théâtre: https://www.theatreprospero.com/
Toutes les photographies proviennent du site web du Théâtre Prospero.
Amélie Lacroix Maccabée