« Elle a couru jusqu’au métro pour ne pas rater le train qui doit la mener à son rendez—vous. Sur le quai presque désert, elle pense à celui qu’elle va rejoindre, à l’odeur de sa peau. À côté d’elle, un vieil homme lui sourit. Le bruit de la rame arrivant à grande vitesse emplit la station quand le petit homme voûté, qui lui sourit toujours, saute sur les rails, comme un enfant qui enjambe un buisson. »
C’est sur cette scène brutale qu’Écoute la pluie de Michèle Lesbre s’ouvre et c’est sur une réflexion sur le temps et l’amour que ce roman se termine. On suit la narratrice lors de son errance nocturne à saveur aérienne. Une errance qui nous enchevêtre entre la métaphore et le réel avec des petites parcelles de références artistiques, et ce, qu’elles soient littéraire, picturale ou musicale.
À la minute où cet incident se produit, l’on ressent ce désir et urgence de vivre que possède la narratrice. Réveillée subitement de son sommeil quotidien – à la limite désalignée de son pilote automatique – la pluie ne fait pas seulement office de titre, mais aussi de définition pure et simple entre sa rage intérieure et le sentiment qui nous enivre lorsqu’il pleut.
Un excellent parallèle est dressé entre l’homme qui saute devant le métro et la vie de la femme, qui restera anonyme tout au long du périple de lecture. (N’est-ce pas génial en soit de pouvoir appeler le personnage comme vous le voulez? Est-ce une Henriette, une Julie, une Élisabeth ou encore une Marie?) Chaque détail dont elle se rappelle de l’homme, si peu soient-ils, lui rappellent un moment, une vie qu’il a déjà eu et qu’elle n’a pas connue et la sienne, cette vie qu’elle a eu, mais qu’elle n’a jamais vraiment vécue.
L’auteur établit un fait : voir la mort nous rapproche de nous-mêmes. On vit donc chaque étape de son questionnement. Parfois, on a l’impression que beaucoup de temps passe entre le début et la fin du livre, pourtant il ne s’agit que d’une journée, racontant son errance nocturne.
Écoute la pluie est d’une douceur et d’une lourdeur phénoménale à la fois. Cette lecture nous enveloppe dans un nuage parfait pour les jours de pluie (aucun jeu de mots intentionnel ici). C’est doux, fluide et ça se lit rapidement. Ces 102 pages se lisent en un claquement de doigts mais laisseront un impact, assurément.
Verdict : Boucle bon Note : 7,5/10 Genre : littérature québécoise, roman, réaliste Éditions : Héliotrope Prix : 19,95$ (Papier) 13,99 $ (Numérique)
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