Woodkid alias Yoann Lemoine n’est pas qu’un simple artiste. Il est, conjointement à l’univers musical dans lequel il baigne, un producteur qui a notamment travaillé sur l’élaboration de clips d’artistes de grande renommée tels que Lana Del Rey, Taylor Swift, Katy Perry et Pharrell Williams. Mais, au-delà de tout ça, c’est un virtuose de la musique, un raconteur d’histoires et un homme plein de sensibilité. S’il s’est avoué intimidé lors du premier tiers de sa prestation dans le cadre de l’ouverture de la 35e édition du Festival International de Jazz de Montréal, il nous a pourtant offert plus qu’un simple spectacle, se rapprochant davantage de l’expérience d’une vie, d’un moment mémorable qui se doit absolument d’être vécu. Trop-plein d’amour en apothéose, c’est les larmes aux yeux que Yoann Lemoine a confié qu’il ne voulait pas que ce moment de complicité intense prenne fin. C’était, sans l’ombre d’un doute, pour son public en liesse qui ne cessait de l’acclamer, plus que réciproque. 150 000 personnes conquises, c’est aussi 150 000 personnes qui portent définitivement, à ce jour, l’artiste d’outremer dans un endroit privilégié de leur être.
Même si c’était son cinquième passage à Montréal, le chanteur français de 31 ans n’a pas fait les choses à moitié pour séduire ou re-séduire son public. Nous offrant une expérience tant visuelle qu’auditive, les mélomanes présents au concert n’auraient pas pu être mieux servis. Au son des cordes, des cuivres et des percussions, Yoann Lemoine nous a interprété l’ensemble de son premier album The Golden Age, sur les tablettes depuis mars 2013, et quelques nouveaux titres de sa majestueuse voix, fidèle à son intensité habituelle, sinon plus. Du bas de mes cinq pieds quatre pouces, même en ayant la vue obstruée par quelques dizaines de têtes, j’ai eu la chance, au même titre que les 149 999 autres personnes qui ont assisté à l’événement, de vivre tout un amalgame d’émotions. Pendant cette heure et demie, le temps s’est carrément arrêté, nous transportant dans un autre univers. D’ailleurs, dès les premières notes de la chanson introductive Baltimore’s Fireflies – une de mes favorites –, pour emprunter les mots de Catherine Chantal-Boivin du journal 24h, « la foule dense qui remplissait la place a semblé se soulever », littéralement. J’avais, à ce moment précis, l’estomac déjà rempli de butterflies.
Yoann Lemoine possède beaucoup d’expérience, notamment en production et en animation, et il est aisé de le constater à la lumière du spectacle de qualité qu’il nous a offert jeudi soir. Il est évident qu’il ait mis le doigt sur une identité de marque bien à lui, une perle rare soit dit en passant, possédant un style musical unique et magistral. Ses arrangements orchestraux solennels mêlés à sa voix grave et apaisante nous donnent l’impression d’appartenir à un conte de fée, d’être le héros de notre propre récit (ça tombe bien, c’était son objectif!). Il a, dans cette même ligne d’idées, collaboré avec la compagnie Ubisoft, basée à Montréal, qui a utilisé deux de ses titres – Iron et Run Boy Run – dans le cadre de la promotion du quatrième opus de la série de jeux vidéo Assassin’s Creed, Revelations. Ubisoft n’aurait pas pu mieux choisir, surtout en considérant l’univers merveilleusement chevaleresque et mélancolique dans lequel la musique de Yoann Lemoine s’inscrit. D’ailleurs, lors de la dernière partie du concert, des percussionnistes étaient affublés de capuches noires, rappelant énormément l’uniforme des assassins que l’on retrouve dans le célèbre jeu montréalais. Bref, avec les effets de lumière kaléidoscopiques et les animations en noir et blanc projetées à l’écran, il y avait définitivement de quoi rêver! Du grand cinéma signé Woodkid!