Il y a quelques mois déjà, une nouvelle initiative a vu le jour sur le web. J’ai particulièrement voulu être celle qui vous présenterait #Jesuisindestructible. Vous comprendrez sûrement un peu mieux pourquoi après m’avoir lu.
J’ai réfléchi pendant trois semaines avant de vous écrire cet article. J’ai réfléchi surtout à pourquoi c’était si important pour moi d’être celle qui vous le présenterait. Je me suis demandée si vous aviez vraiment besoin de savoir ça, à ce temps-ci de l’année où tout est sensé être réjouissance et amour.
La première fois où je suis tombée sur des images du projet, ça a été difficile. Ça m’a rentré dedans comme un ouragan. Moi aussi Je suis une indestructible. On a abusé de moi lorsque j’avais 16 ans après une soirée entre amis.
Ils étaient plus âgés que moi. C’était des amis de ma meilleure amie de l’époque, qui était un peu plus vieille que moi, elle aussi. On avait fumé un petit joint dans le terrain vague adjacent à la maison avant d’entrer. On se sentait cool. Je n’avais aucune crainte; je m’en allais voir des gars et flirter, comme une fille de 16 ans…Puis, la soirée s’est étirée et ma copine est repartie à la maison, mais moi, je suis restée là-bas. Elle a toujours cru que je voulais rester. En quelque sorte, oui, un peu, parce que j’avais du plaisir, mais la ligne est mince entre le moment où on a du plaisir et celui où tout bascule. Ce que je ne voulais certainement pas, c’est ce qui s’est produit, une fois que mon amie est partie.
Le lendemain matin, quand je lui en ai parlé elle ne m’a pas cru. Elle m’a fermé la porte de sa chambre au nez. Je lui en ai longtemps voulu. On en a jamais reparlé, jusqu’à tout récemment 15 ans plus tard. J’ai alors pu prendre le temps de lui partager ma peine, pour la première fois, mais surtout j’ai pu lui en parler en tant qu’adulte en lui exposant tout ce que ça impliquait d’être une survivante d’agression sexuelle.
Dieu que ça nous fait peur ces mots «agression sexuelle». C’est malheureusement la réalité douloureuse de plus d’un tiers des femmes âgées de plus de 16 ans (et de plus d’un homme sur six…parce que le viol n’a pas de genre féminin ou masculin). Certains dénoncent, d’autres se taisent et chacun pour des raisons bien personnelles. Je n’en veux plus à cette amie qui ne m’a pas cru. Ce n’est pas de sa faute, ce n’est pas elle qui a abusé de moi. Ce sont eux les coupables, pas elle. Ni moi.
Le viol c’est tabou et sale. C’est une plaie qu’il faut cacher et qui, trop souvent, finit enfermée à double tour au fond de l’âme. On n’en parle pas à n’importe qui. On se fait traiter de pute par ceux qui n’y croient pas, par les amis de ces agresseurs et parfois on finit par y croire. On se demande même si c’était pas un peu de notre faute. NON! Rewind.
Il faut que ça change !
C’est pourquoi j’ai décidé d’être celle qui vous en parlait, mais c’est aussi ce qui m’a aidé à prendre ma décision. IL FAUT EN PARLER. Il faut que les victimes cessent de se taire et parlent.
Mais comment ?
La plateforme qu’offre l’instigatrice du projet Je suis indestructible est rapidement devenue un lieu de bouleversants témoignages et s’est remplie d’images libératrices pour les victimes. Bien qu’inspirée du projet Unbreakable, la version québécoise se veut moins intrusive dans le processus de la victime et désire donner le pouvoir à celle-ci de choisir le meilleur médium pour exprimer ce qu’elle a besoin de dire. On ne nomme jamais le nom de la victime, parce que le but de ces témoignages est d’avoir un effet libérateur et non accusateur.
Cette démarche artistique peut s’articuler sous diverses formes:
-Citer l’agresseur
-Citer des mots, que vous, vous auriez aimez lui dire à ce moment-là…
-Citer un cri du cœur, des mots que vous aimeriez lui dire maintenant.
Pour participer au projet, il suffit d’écrire à l’adresse suivante : [email protected] ou bien de les contacter via Facebook et Twitter.
Tanya, aujourd’hui intervenante sociale et elle-même victime d’agression sexuelle, voit cette plateforme comme un lieu pour la victime pour se confier dans un premier temps, avec l’anonymat qu’Internet offre.
«Parfois les victimes n’ont pas envie de recevoir ce regard de pitié des gens auxquels elles se confient.»
C’est vrai qu’on ne sait pas toujours comment réagir à ce genre de confidences. J’en ai eu la preuve quand j’étais adolescente. On peut carrément ne pas y croire. Ce genre d’endroit virtuel que Tanya et son équipe ont créé offre d’outiller les gens à recevoir ce genre de témoignages, de s’informer, de constater les conséquences d’un agression. Sur #Jesuisindestructible, on parle aussi d’actualité entourant le sujet, on parle de culture du viol, de droits des femmes et on aborde aussi l’agression chez les garçons et les hommes.
En plus d’offrir cet endroit de confidences, Je suis indestructible désire aller plus loin et a mise en place un premier café-causerie. Une expérience qui se répétera selon Tanya.
Être indestructible ne signifie pas qu’il n’est pas difficile de passer à travers les conséquences d’une agression sexuelle. Être indestructible, c’est ne pas donner le pouvoir à notre (nos) agresseur(s) de nous achever. C’est faire preuve de résilience et s’outiller pour devenir une personne plus forte.
«Je suis indestructible. Parce que nous sommes indestructibles. Parce qu’aucune victime d’agressions sexuelles ne doit rester dans l’ombre. Ensemble, brisons les chaines du silence. »
Le viol laissera toujours des traces, j’en porte moi-même les cicatrices permanentes, mais il est possible de se reconstruire et d’apaiser cette douleur à l’âme qui nous habite, nous victimes, nous indestructibles…
J’espère que ce témoignage aidera d’autres personnes à sortir de l’ombre et à en parler. À une amie, à un proche, un professionnel ou à un inconnu à l’écoute, mais s’il-vous-plaît, parlez. C’est la première étape d’un chemin vers la reconstruction de soi-même, c’est peut-être l’étape la plus difficile pour certain, mais soyez assurés que sur la page de #Jesuisindestructible, votre confidence sera accueillie dans le respect et la compassion. Si vous êtes un proche, vous trouverez des outils pour vous et la personne qui s’est confiée à vous.
PARLONS-EN. Ça suffit.
Pour de l’aide …
Avec amour.
Pour me joindre :
A reblogué ceci sur De mal en piges !et a ajouté:
Parce qu’une femme sur deux sera victime d’agressions sexuelles dans sa vie… Débloquons la parole.