L’Halloween et la découverte du masque
Enfant, on se déguise pour une des premières fois à l’Halloween. Nos parents nous habillent et trouvent ça bien marrant de nous voir nous enfarger dans notre queue de lion ou nous gratter la crinière de licorne. On enfile un masque pour la première fois.
Puis, on fête l’Halloween avec notre cœur d’enfant jusqu’à l’adolescence. On arrête le porte-à-porte quand les adultes qui nous ouvrent, garrochent des bonbons dans notre sac avec un look de : «Tu ne trouves pas que t’exagères là ? Tu passes pu l’Halloween, tu quêtes du chocolat.»
Quand tu empruntes la voiture de tes parents pour aller passer l’Halloween dans un quartier plus riche, afin d’avoir des bonbons de qualité; prends ta paye de gardiennage ou de camelot et va t’acheter ce que tu veux ! Get it, c’est fini !
Mais le masque, lui, en vieillissant, il ne disparaît jamais. On le garde. Il devient un bouclier, une sécurité qui nous aide à passer les différentes étapes de la vie.
Maman avait raison
Étant petite, je me souviens avoir vu une dame corpulente au Dairy Queen et avoir dit haut et fort : «Maman, il me semble que cette madame là ne devrait pas manger de crème glacée.» ERREUR. Je l’ai vite appris, je n’avais pas le droit de dire cela. C’est socialement inacceptable. Une chance.
C’est là que maman m’a dit pour la première fois : « Toute vérité n’est pas bonne à dire. Quand on s’exprime trop, qu’on dit trop ce qu’on pense, on blesse les autres.» C’est une question de survie, maman avait raison, il faut porter un masque. Telle une barre Mars, ce dernier, est bon : au travail, au repos et dans les loisirs.
Quand le masque divise
Dans l’optique de l’aspect humain et du respect des autres, c’est vrai qu’on peut se garder une petite gêne. Je n’ose pas imaginer de quoi aurait l’air la vie si tout le monde se promenait sans masque, sans filtre : «Hey le boulanger, ton pain goûte la marde.» «Tu sais le projet que tu as présenté à la réunion ? On a aimé, mais on a passé l’heure du dîner à rire de toi et de la façon dont tu t’exprimes mal en public.» On ne veut surtout pas ça.
Par contre, le masque, au Québec, divise les gens. Même si nos propos sont justifiés, il faut constamment doser. Il y a des choses que l’on peut dire dans notre salon, mais pas en société, parce que ça dérange. Ici, on n’aime pas quand les autres sont trop différents. C’est vrai pour la religion, les choix politiques, la musique, l’humour, le cinéma…Ça cause des escarmouches !
Le masque nous rend sympathique et accessible. Comme humoriste, ce dernier est primordial, autant dans nos dires que dans notre façon de dire. J’étais dans une loge de spectacle lorsqu’un collègue m’a dit : « C’est dur d’entrer sur scène quand les gens te connaissent pas et de commencer avec ce que tu avais prévu. Il faut d’abord jaser, être sympathique et se faire adopter en 3 secondes par le public. Aux États-Unis, le stand up, c’est différent. La première phrase de l’humoriste, ce n’est pas: «Bonjour, je suis très content d’être ici ce soir. » Non, il entre et balance son premier punch. Le monde l’accepte tel qu’il est en se disant on va passer 10 minutes avec ce gars là, rions.» Tellement véridique.
Au Québec on aime se faire cajoler. On veut t’aimer avant de savoir ce que tu as à offrir. C’est aussi vrai pour un nouvel employé dans un bureau. À talent égal, à scolarité équivalente, celui qui a l’air plus «humain» va décrocher le boulot. On aime les gens qui se rangent, qui ne font pas trop de bruit. Dans les concours, les télé-réalité c’est souvent la petite timide qui gagne, parce qu’elle est dont sympathique. Parfois, rien à voir avec le talent.
Alors c’est pour ça que l’Halloween éveille chez moi annuellement ce questionnement. Suis-je enfermée dans mes opinions ? Suis-je libre ? Est-ce que mon masque m’aide à me protéger et donner aux autres ce qu’ils attendent de moi ou met-il un ombrage sur ma personnalité ? Est-ce que je porte le bon masque ? Suis-je pour ou contre le port du masque ? ARGHHHH…Je ne sais plus, qu’on me ramène ma crinière de licorne !
SINCÈREMENT, Nadine Massie ;)