Par Alexandrine Désourdy
Afin de célébrer leur 40e anniversaire, les Ballets Jazz de Montréal ont présenté un programme tout nouveau en trois temps. Définitivement, Louis Robitaille, directeur artistique depuis 1998, a du flair pour présenter un spectacle explosif. Les BJM sont reconnus pour leur forte interprétation et leur athlétisme, et je dois dire que c’est ce dont nous avons eût droit lors de la représentation du 28 septembre dernier.
La première pièce se voulait très sombre, lourde, voire inconfortable. La musique distordue se ponctuait de coups presque stridents. Fuel est décrit comme moderne et industriel. Pari réussi. La variation entre les vitesses a vraiment rendu cette dynamique effrénée. Comme si tout était à l’état brut. Comme si le rapport entre les couples était froid, distant. Comme si, entre les hommes et les femmes, existait un rapport de force.
La deuxième pièce, celle précédent l’entracte, présentait un pas de deux intense. Déjà le piano de Philip Glass nous emportait totalement dans leur intimité; le décor y joua aussi pour beaucoup avec son blanc très pur rendant l’image irréelle et même intemporelle. La chorégraphie très fluide démontra une grande précision des mouvements, toutes les transitions s’enchaînaient harmonieusement. De mon siège, j’ai senti la connexion entre les danseurs créant ainsi une proximité entre eux, mais aussi entre moi et eux. Je crois que Closer a réellement su capter l’attention des spectateurs. Toutefois, le choix de cette pièce fut plutôt surprenant pour les BJM qui n’ont pas l’habitude d’aller dans un registre aussi classique.
La troisième et dernière pièce est allée chercher une tout autre dynamique bien plus hétéroclite que d’ailleurs j’associe plus au style des BJM. Avec humour, on y a présenté des gens d’un petit village, je pourrais supposer, et il y avait là une histoire qu’on nous racontait. Cette histoire exposait la dualité entre le monde des dieux et le monde rationnel tout en ayant pour sujet principal : la vie et la mort. Ce sujet était parfaitement exploité pour présenter les questionnements humains qui existent depuis belle lurette si ce n’est la nuit des temps! On y voit encore un rapport homme- femme en opposition, comme dans Fuel. Dans ce cas-ci, on voit toute la séduction, la sensualité voire la sexualité et aussi leur différence de pensée. Les femmes sont plus émotives; on leur reproche souvent d’associer le sexe à l’amour. C’est exactement un des constats qu’on y a fait. La musique changeait de style bien souvent tout en revenant plusieurs fois à ces airs des films d’époque. Je dois dire que le choix de la pièce musicale pour la partie des filles fut quelque peu décevant. J’ai trouvé que cela se démarquait trop du reste même si j’ai bien compris le style un peu plus décousu de cette pièce qui, au final, m’a beaucoup plu.
Ce spectacle évoque parfaitement l’évolution des BJM grâce à l’adoption de nouveaux styles de la compagnie. Je suis très contente qu’ils se soient permis d’aller chercher trois registres très différents, mais tout aussi intéressants. On peut dire que cette compagnie a de la gueule et qu’après 40 ans, elle n’a pas pris un pli!