Quand on parle Jazz, on pense à une trompette, un saxophone, un piano. On pense à des gens ayant la musique dans leurs émotions, se donnant corps et âme à l’art qu’ils entretiennent.
Moi, je pense à Ella. Ella Fitzgerald, « The first lady of Song », une grande dame qui aura, à sa manière, changé le monde de la musique de tous genres. Sa carrière prolifique aura duré près de soixante ans et elle aurait chanté plus de deux mille chansons. De plus, cette artiste a eu la chance de chanter avec bon nombre de grands musiciens tels que Louis Armstrong ou encore Duke Ellington. Ses habiletés vocales étaient uniques. Partout où elle passait, elle conquérait son audience. Mais son talent ne s’arrêtait pas là. Elle avait aussi de grands talents d’improvisatrice et cela lui a valu beaucoup d’admiration. Sur la scène, la diva savait être chaleureuse et généreuse. Pas étonnant qu’on se rappelle autant d’elle. Comme l’a dit France Gall dans sa chanson de 1987, Ella, elle l’a!
En faisant un tour de sa vie, on vient vite à la conclusion qu’Ella est une force de la nature. Le divorce de ses parents et la mort prématurée de sa mère a entrainé la jeune Ella dans un début de vie difficile. Guère mieux à l’école, ses mauvaises notes la poussèrent à s’y absenter régulièrement. Elle fut également trimbalée d’un bout à l’autre de New York, visitant les orphelinats et les écoles pour enfants en difficulté. Malgré ces revers, elle gardait cette passion : celle de chanter et de danser. C’est à travers divers concours et de nombreuses prestations dans de petites salles de spectacles qu’elle s’est fait un nom. Très rapidement, elle a pu vivre de son art et le reste n’est que de l’histoire.
Elle a fait ses armes en musique à la fin des années 30 alors que la ségrégation ethnique était omniprésente aux Etats-Unis. Imaginez: être une femme noire essayant de percer et de se frayer un chemin dans un domaine où tous les critères de sélection sont subjectifs. Ce n’est pas facile. Pour beaucoup, cela aurait voulu dire la fin de leurs carrières, mais pour Ella, c’était ce qui lui fallait pour mettre les bouchées doubles. Elle avait l’amour de chanter, ce qui lui a permis de transgresser les barrières mises contre elle. Elle disait d’elle-même être une personne très timide. Pourtant, elle a toujours donné tout ce qu’elle avait.
« I’m very shy, and I shy away from people. But the moment I hit the stage, it’s a different feeling I get nerve from somewhere; maybe it’s because it’s something I love to do.”[1]
Elle explique cette timidité par son apparence physique: corps menu et peau foncée. À cette époque, un idéal de la femme était proposé dans la société. La “sex-symbol” était nul autre que Marilyn Monroe, qui soit dit en passant, était une admiratrice d’Ella elle-même. Au lieu de se laisser abattre, elle utilisa plutôt ses différences à son avantage! À mon sens, elle est une pionnière du mouvement féministe, refusant de se coller à des exigences irréelles. Sa passion, la musique, lui donna la force de montrer au monde entier que l’apparence ne sera jamais un frein à l’épanouissement.
Mesdames, que vous soyez petite, grassouillette, noire ou daltonienne, personne ne pourra juger de vos passions et de l’amour qui vous carbure! C’est ce qui, en fin de compte, vous rend belle et charmante.
P.S. : Je vous invite tous à découvrir cette extraordinaire artiste inégalée. Laissez-vous imprégner par sa voix jazzy et claire! Voici quelques titres phares : Summertime, It don’t mean a thing (If it ain’t got that swing), How High the Moon, Cry Me a River (avec Joe Pass).
[1] https://www.brainyquote.com/quotes/authors/e/ella_fitzgerald.html (page visitée le 16 octobre 2012)