Cette semaine, en procrastinant faisant le ménage, je suis tombée sur LA boite de vêtements d’été. Puis, tout au fond de la boite, je trouve un bikini. Il faut comprendre que je ne suis pas le genre de fille à mettre un bikini. C’est juste pas dans mon style. Je suis plus du genre surfeuse style. Mais à un moment donné, dans ma vie, je me suis dit « hey ça me tente d’acheter ça un bikini », puis j’ai acheté un bikini. Tu vois, c’est jamais très compliqué dans ma tête. Ce bikini a fait un superbe voyage autour de la Gaspésie et il s’est trempé en masse dans les eaux frettes de ce coin de paradis.
Et là, 10 ans plus tard, avec trois marmots derrière la cravate, je retrouve ce bikini dans le fond d’une boîte. « Je vais l’essayer », que je me dis. Tu vois, j’aime l’aventure et le goût du risque. J’enfile mon bikini et je me regarde dans mon énorme miroir. Le choc.
Le choc ne venait pas de ce que je voyais. Je me vois quand même toute nue sur une base régulière. Non, le choc venait de la contradiction entre ma tête et mon cœur. Ma tête sait depuis longtemps que je n’ai plus le corps de mes 16 ans, ni même celui d’avant mes grossesses, ni même celui d’entre mes grossesses.
Ma tête sait que chaque vergeture que mon ventre affiche est le résultat d’avoir créé trois êtres humains qui avaient besoin d’agrandir cet espace pour se développer.
Ma tête sait que le surplus de peau de mon ventre et sa molleté ont protégé ce qu’il y avait de plus précieux dans mes entrailles.
Ma tête sait que les poignées d’amour que j’ai en permanence sur les hanches ont permis à mes enfants de se nourrir à leur guise parce que j’emmagasinais pour eux les bons gras dont ils avaient besoin.
Ma tête sait que mon bassin élargi pour toujours a permis à trois petites personnes (la grosseur reste relative) de se frayer un chemin pour venir au monde.
Ma tête sait que mon nombril jadis rond et centré, maintenant déformé et introuvable, l’est parce que mes abdos ont dû le laisser tomber pour soutenir le poids de mes grossesses.
Ma tête sait que mon ventre est toujours bombé comme si j’étais enceinte, parce que justement mes abdos n’ont pas pu s’adapter à la grosseur de mes bébés et que c’était la chose à faire pour qu’ils soient en santé.
Ma tête sait tout ça.
Maintenant, quand mes yeux voient ce corps dans un bikini d’avant, avec tout ce que ma tête sait, maintenant, après mes grossesses, il y a un choc. Le choc de mon cœur qui, d’emblée, trouve ça dégoûtant. Mon cœur ne comprend pas ce qu’il voit, ça ne correspond pas au souvenir qu’il avait de ce corps dans ce bikini. Il regarde ce corps dans le miroir et il ne trouve pas ça beau. Il se demande pourquoi je lui fais subir ce supplice.
Ma tête tente d’expliquer à mon cœur avec tous les mots qu’il connaît, les « pourquoi » des « comment », mais mon cœur ne parle pas le même langage que ma tête. Il ne reconnaît pas ce qu’il voit dans le miroir ni dans ses souvenirs, ni dans ce qu’il voit, dans le présent, et à tous les jours.
Les larmes me montent aux yeux et je les laisse couler à flots, parce que vient un temps où il faut faire sortir ce genre d’émotions corps-traumatiques.
En me regardant à travers mes yeux embrouillés, je repense à cet article de Maman a un plan, où elle parlait de son cheminement avec son corps et le fameux costume de bain. Je pense à ça en laissant couler mes larmes.
La porte de ma chambre s’ouvre et mon fils apparaît. Il me voit pour la première fois en bikini et s’exclame : « Wow maman! T’es magnifique! »
À travers ses yeux, je vois toute la beauté qui m’appartient.
Enfin, mon coeur, ma tête et mon corps se sont mis à parler le même langage! Je suis magnifique. Point.
Mère Rebelle
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*Crédits photo pour l’image de l’article : Josée Charland
Tu es belle « inside and out » :) Bravo! Il faut se le dire à chaque jour, parce que nos enfants eux, ils le savent :)
Merci pour ce texte… je me reconnais beaucoup dans ce que tu écris, et oui, moi aussi j’ai pleuré!! Il suffit pourtant d’un calin d’une de mes quatre merveilles et j’oublie tout.
Tu m’as presque fait pleuré (merci hormone d’après accouchement !!!) ! Je n’ai jamais eu un corps de rêve, j’ai toujours été un peu ronde, mais pas flasque ! Maintenant mon ventre est mou et pendant… et j’en suis qu’à ma deuxième ! Bref je te comprends et je trouve ça très beau l’innocence de nos enfants, ils ne voient que l’essentiel et c’est ce qui compte !